Pensée pour objectiver une problématique et permettre aux décideurs de prendre une décision éclairée, l’expertise scientifique se trouve ainsi en crise… depuis au moins 30 ans. Une crise donc permanente entre soupçons de conflits d’intérêt, dénigrement d’évaluations et instrumentalisation par les pouvoirs politiques pour légitimer leur décision sous couvert de scientificité. L’expertise ne ferait-elle plus ses preuves ? D’autant qu’avec la crise du Covid-19, aux côtés d’un conseil scientifique dédié venant en appui du gouvernement, se sont ajoutées tous les experts plus ou moins autoproclamés, qui ont distillé leurs avis sur les plateaux radio et télé, jetant un peu plus le trouble sur cette fonction.
Dans ce contexte qui croire ? Que peut-on vraiment attendre de l’expertise scientifique en temps de crise ? Et quelles nouvelles formes d’expertise – collective, hybride – sont à même de redonner du sens à cet exercice ?
Co-organisée par la Mission Agrobiosciences-INRAE et le Quai des savoirs, cette rencontre-débat proposait de faire le point. Avec les analyses de :
- Jean-Pierre CRAVEDI, ancien directeur de recherche INRAE, ancien expert au sein de l’EFSA, président du conseil scientifique d’Aprifel ;
- Pierre-Benoît JOLY, président du centre INRAE Occitanie-Toulouse, spécialiste de sociologie de l’innovation, président du Groupe de travail "Crédibilité de l’expertise scientifique" issu du Conseil scientifique de l’Anses ;
- Didier POURQUERY, journaliste, président de The Conversation France et de Cap Sciences ;
- Bruno SPIRE, directeur de l’équipe SanteRCom (Inserm), ancien président de l’association AIDES.
Cette rencontre a été organisée le jeudi 06 juillet 2023, de 18h15 à 20h00 au Quai des Savoirs de Toulouse. ILLUSTRATION : Erik Tartrais, pour la Mission Agrobiosciences-INRAE
L’appel à contributions
En amont de la rencontre, la Mission Agrobiosciences-INRAE a lancé un appel à contribution, autour des questions suivantes :
- Qu’est-ce qu’un expert scientifique selon vous ? Qu’en attendez-vous ?
- Quel est ou devrait être son rôle ?
- Y a-t-il des formes d’expertise scientifique à privilégier et pourquoi ?
Consulter ci-dessous les contributions éditées :
- "Le choix des experts : un enjeu démocratique", par François Saint-Pierre, mathématicien et responsable du Café Politique (Balma)
- « Les expertises scientifiques collectives sont des outils de la démocratie sanitaire », par Laurent Fleury, responsable du pôle Expertise collective à l’Inserm
- "L’expertise est toujours limitées" Par Mathias Girel, Maître de conférences à l’Ecole Normale Supérieure, Mathias Girel est notamment l’auteur de « Science et territoires de l’ignorance » édité aux chez Quae, en 2017
- "Sur Internet, ce n’est pas le statut qui fait l’expert mais sa capacité à convaincre." Par Romain Badouard, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université Paris-Panthéon-Assas et auteur de "Le désenchantement de l’internet. Désinformation, rumeur, propagande" (FYP Edition, 2017, en illustration)
- L’expertise scientifique : une question mal posée ? Par Jean-Michel Hupé, chercheur CNRS en écologie politique au laboratoire FRAMESPA de l’Université de Toulouse Jean Jaurès et membre de l’« Atelier d’écologie politique »
- L’expertise collective à l’Anses. Explications sur l’expertise pluridisciplinaire à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail
Consulter également la feuille de salle
Borderline : Les limites en débat dans les champs des sciences et du vivant
Après avoir piloté pendant plus de vingt ans les Controverses européennes, à Marciac puis à Bergerac, la Mission Agrobiosciences-Inrae initie un nouveau cycle d’échanges pluriannuels, au plus près des différents publics concernés, en coproduction avec le Quai des Savoirs. Son fil rouge ? Explorer les champs de tension qui s’exercent aujourd’hui autour de l’idée des limites, qu’elles soient frontière géographique, borne des savoirs, seuil éthique ou finitude des ressources. Des espaces intermédiaires souvent flous, que les uns souhaitent annihiler quand d’autres les voudraient inviolables. Se tenir tout au bord de ce trouble, saisir les états-limites qui traversent les champs des sciences et du vivant, c’est ce que propose BorderLine à partir de septembre 2021. Des débats accessibles gratuitement à tous les publics, laissant une large part aux échanges et aux regards croisés, pour instruire collectivement les points de frictions et les voies possibles, sans partis pris ni évitements. Il donne lieu, à l’issue de chaque rencontre, à la réalisation d’un podcast disponible sur toutes les plateformes d’écoute et ou d’un replay vidéo.
Le Quai des Savoirs. Un allié naturel puisque ce centre culturel de la métropole toulousaine consacré aux sciences, aux innovations, et à la création, invite à reprendre la main sur nos futurs par l’exploration des enjeux des recherches contemporaines et des différents récits prospectifs en cours. Expositions immersives, ateliers de pratique pour petits et grands, spectacles, rencontres publiques, publications numériques, résidences d’artistes… le Quai des Savoirs déploie toute une panoplie d’interactions entre les citoyens, les chercheurs, les créateurs, et les décideurs. En s’associant à la mission Agrobiosciences-INRAE pour interroger les limites en débat dans les champs des sciences et du vivant, il contribue à partager les savoirs, animer le débat public et imaginer des futurs désirables.