"Nos territoires sont le siège d’interfaces. C’est que veulent nous donner à voir les coordinateurs de cet ouvrage. Leur préoccupation est d’abord d’ordre conceptuel . Classiquement, la géographie représente les territoires comme des à-plats délimités par des lignes et où figurent des points figurant des lieux singuliers. Il s’agit ici de renouveler la science de la représentation des territoires en introduisant la théorie des interfaces. De quoi s’agit-il ? Dans un contexte de mondialisation des échanges, les mobilités des gens et des marchandises se jouent entre territoires différenciés par l’intermédiaire de lieux particuliers qui exercent des fonctions d’échanges et de mises en relation : les interfaces. « Le parti pris des auteurs est de considérer les interfaces comme des espaces spécifiques, stratégiques, qui concentrent en leur sein des effets, des particularités qui passeraient inaperçues avec une approche territoriale classique ».
Ces interfaces, par leurs fonctions d’échanges, apportent de la valeur ajoutée. Il s’agit d’un « évènement spatial », ou encore d’un « objet géographique », qui contribue à la richesse des territoires. Un concept important et méconnu que les auteurs mettent en lumière par des analyses de situations concernant des domaines très différents au sein des territoires et à différentes échelles spatiales et temporelles, qui illustrent notamment l’émergence de « nouvelles conception de l’interface nature-culture » (Paul Allard) : les fleuves, les littoraux, les plates-formes d’intermodalité, les réseaux ferrés, les palais des congrès, l’accès aux soins par le tourisme sanitaire.
Du fait de la localisation géographique des contributeurs, les configurations analysées sont principalement situées dans le sud-est de la France. Cet effort de conceptualisation s’applique aussi aux territoires ruraux, comme le montre la contribution de Corinne Lampin-Maillet. Elle décrit les différents types d’interfaces habitat-forêt observées en région méditerranéenne, et montre que leur inventaire et leur localisation permettent de spécifier les risques que font encourir aux habitants leur choix de vivre dans une plus grande proximité de la nature mais aussi dans une plus grande vulnérabilité aux incendies de forêt, une illustration des dynamiques affectant l’interface nature-culture. Comme les autres auteurs, elle argumente en faveur d’une meilleure connaissance de celles-ci et de leurs traces dans les territoires en vue de fournir à la société de meilleurs outils pour s’adapter ou pour anticiper les événements. On peut être tenter d’appliquer ces nouveaux éclairages aux activités agricoles et agroalimentaires, intimement liées aux territoires et à l’évolution des interfaces nature-culture : par exemple la localisation des centres de stockage des coopératives agricoles sur leur territoire, les fonctions des équipements portuaires d’échanges et de traitement des matières premières, ou encore celles des plates-formes logistiques de la grande distribution dans la proximité des grandes agglomérations.
Cet ouvrage témoigne incontestablement des avancées en cours de la science géographique pour affiner ses modes de représentation des territoires en rapport avec les évolutions actuelles de nos sociétés."
Jean-Claude Flamant. 2011
Les auteurs font partie du groupe de recherche intersites « Interfaces » de l’UMR 6012 Espace CNRS (Etude des structures, des processus d’adaptation et des changements de l’espace)
Cette note de lecture est parue dans les « Comptes-rendus de l’Académie d’Agriculture de France », volume 97, numéro1, pages 128-129
Sommaire
- Avant-propos
- Partie I - Les interfaces des espaces en mutation rapide
L’émergence de nouvelles conceptions de l’interface nature-culture
Jean-Paul FerrierLes interfaces habitat-forêt, une nouvelle clé d’entrée pour l’évaluation du risque d’incendie de forêt
Corinne Lampin-Maillet
- Partie II - Temporalités et interfaces
Le Rhône vu comme une interface
Paul AllardInterface terre-mer : la nouvelle "donne" de la littoralisation
Isabelle Mor
- Partie III - Accessibilité et interfaces
Les pôles d’échanges, des interfaces au service de l’intermodalité
Laurent ChapelonLes réseaux ferrés dans l’espace métropolitain émergent des deux rivieras : une analyse par les interfaces
Giovanni Fusco
- Partie IV - Les interfaces de la mondialisation
Interfaces villes-tourrisme de réunions et de congrès-palais des congrès
Sylvie ChristofleSanté et interfaces
Sandra PérezRéférences bibliographiques
Les auteursLire sur le magazine Web de la Mission Agrobiosciences (publications originales accessibles gratuitement) :
- La commune rurale ne grandit pas. Elle se remplit. Elle devient obèse. Un exposé de Gérard Tiné, plasticien, enseignant-chercheur honoraire au laboratoire Li2a Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Toulouse. Dans le cadre de la 14ème Université d’Eté de l’Innovation Rurale (Les Controverses de Marciac), C’est par où, le rural ?.
- Le rural, objet indéfini ?. Un entretien avec Jean-Charles Lollier, chargé de mission aux affaires européennes pour le Cnasea. Dans le cadre de la 14ème Université d’Eté de l’Innovation Rurale (Les Controverses de Marciac), C’est par où, le rural ?.
- "Faut-il réintroduire l’homme dans la nature ? Les risques d’une fracture écologique.". La restitution de la Conversation de Midi-Pyrénées. Avec les propos introductifs de Georges Rossi, géographe. Télécharger la restitution PDF
- Agriculture, territoires ruraux et société. "La vérité est-elle dans le pot de confiture ?". Par Olivier Lazzarotti, géographe, Professeur à l’Université de Picardie Jules-Verne. Dans le cadre de la 14ème Université d’Eté de l’Innovation Rurale (Les Controverses de Marciac), C’est par où, le rural ?.