"Faim zéro : en finir avec la faim dans le monde"
Le mercredi 22 octobre 2014 à la Librairie Ombres Blanches Bruno Parmentier, économiste, venait nous présenter son dernier ouvrage : "Faim zéro : en finir avec la faim dans le monde" (La Découverte, 2014). Avec la participation de Marion Desquilbet, économiste. Une collaboration entre la Librairie Ombres Blanches et la Mission Agrobiosciences. Retour sur cette rencontre placée sous le signe de l’éradication de la faim dans le monde et du besoin de nouvelles régulations.
TROIS QUESTIONS A BRUNO PARMENTIER
PROPOS EPARS avec Bruno PARMENTIER from AGROBIOSCIENCES TV on Vimeo.
Dans la préface de cet ouvrage, Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation de 2008 à 2014, dit que celui-ci vient à son heure. Et il fixe d’emblée les enjeux : revoir l’approche de la faim et de la malnutrition. Afin d’éradiquer trois fléaux : la sous-alimentation, la malnutrition et l’obésité.
« La faim sème le germe des conflits et les conflits exacerbent la faim » nous dit José Graziano da Silva, directeur général de la FAO. Le livre commence par un douloureux constat : « Sur notre belle planète bleue, au milieu des années 2010, près de 850 millions de Terriens se couchent tous les soirs avec une faim qui leur donne mal au ventre, en se demandant comment ils pourront se nourrir suffisamment le lendemain ». Puis plus loin : « Si on voulait vraiment en finir avec ce fléau, à peine 10 milliards de dollars de dépenses annuelles suffiraient pour sauver ces vies, à condition qu’ils soient bien employés… Et chaque dollar investi de la sorte pourrait en rapporter à terme au moins trente en activité économique supplémentaire, en réinsérant les exclus dans le circuit économique de production et consommation de richesses. »
Pourquoi, alors qu’on a réussi en un siècle à nourrir 5 milliards de personnes supplémentaires, ne peut-on l’éradiquer ?
Aujourd’hui, la faim n’est plus fille de l’ignorance ou des incidents climatiques, mais de la cupidité, de l’incurie et de l’indifférence. Il s’agit d’un phénomène politique, et son élimination relève donc de l’action politique. De la volonté en quelque sorte. Bruno Parmentier note : « la faim est d’abord politique. Elle a toujours été la conséquence de l’ignorance, de la guerre, et de l’absence d’Etat, des conflits pour s’accaparer les ressources naturelles. Et, dorénavant, elle est également un sous-produit de la mondialisation et de l’absence de contrôle public des multinationales. »
Certains pays remportent ainsi des victoires, tels la Chine, le Viêt-nam ou le Brésil – avec son programme « Faim zéro » –, alors que d’autres stagnent, comme l’Inde, ou reculent, comme la plupart des pays d’Afrique subsaharienne.
Cependant l’ouvrage se veut optimiste. Malgré le réchauffement de la planète et l’augmentation de la population, malgré l’accaparement des terres ou la production d’agrocarburants au détriment des aliments, les solutions existent pour que tous mangent à leur faim, dès lors que les États se décident à agir : cela passe par la défense de la petite agriculture familiale, la promotion de nouvelles alliances public-privé, un modèle d’agriculture écologiquement intensive, notamment.
A ce propos, deux axes sur lesquels il sera peut-être intéressant de revenir : l’utilisation ou pas des OGM, où l’auteur se montre prudent ; et l’agriculture écologiquement intensive : le sans labour, l’agroforesterie ; mais aussi la fin de l’accaparement des terres agricoles par des pays comme la Chine, la Corée du Sud ou les émirats arabes.
Les derniers chapitres du livre posent la question d’une gouvernance mondiale : collaborations resserrées entre institutions internationales, ONG et fondations pour en finir avec ce que vous nommez : « la faim, ce fléau créé par l’homme ». On peut y arriver, si les citoyens, leurs organisations et leurs gouvernements reconnaissent la faim comme le principal problème que doit affronter l’humanité.
Alors une question simple : Quand va-t-on y arriver et sommes-nous en train d’y parvenir ?
La discussion avec la salle devait aborder la sous-alimentation, la malnutrition et l’obésité. La place des systèmes alimentaires locaux et la relocalisation.
L’expérience Faim Zéro de Luiz Inacio Lula da Silva ainsi que la participation de la société civile. Sans oublier le nécessaire accompagnement démocratique à travers des initiatives locales et les pressions citoyennes.
Si la faim une création humaine comment réorienter les politiques ? Existe-t-il des modèles exportables ? Comment expliquer ce seuil de 800 millions d’affamés que l’on ne peut pas résorber ? Comment aller au-delà des bonnes intentions ? Beaucoup d’interrogations à ce jour sans réponses.