Touche pas à mon jacaranda

Transplanté en ville, l’arbre d’alignement ou d’ornement peut acquérir une valeur poétique et même politique supérieure à bien de ses congénères des forêts. Exemple avec le « Flamboyant bleu », arbre tropical importé d’Amérique du Sud dont la floraison est aussi éphémère que spectaculaire.
À Lisbonne, une manifestation était annoncée dimanche 30 avril contre la disparition annoncée de 45 « jacarandas » d’une avenue pour construire un parking souterrain. On recense 4.000 de ces arbres importés au XIXe siècle dans la capitale portugaise et, en une semaine, plus de 50.000 habitants ont signé la pétition lancée par un riverain, rapporte Courrier International. « Les Lisboètes sont très attachés à la présence des jacarandas en raison de leurs fleurs bleues et violettes exubérantes, qui confèrent à leur ville une couleur très intense et une grande valeur esthétique. Ils en sont des éléments structurants, font partie de son identité et commencent même à en devenir des symboles », explique une architecte-urbaniste dans les colonnes du quotidien portugais Publico.
La municipalité, qui n’entend pas renoncer à son projet de parking, a été contrainte d’organiser une conférence de presse pour défendre son aménagement. Elle assure qu’elle ne coupera que 25 arbres et s’engage à en « transplanter » 20 autres, selon l’agence nationale de presse Lusa (équivalent de l’AFP au Portugal). La directrice municipale des Espaces Verts de Lisbonne promet même de replanter 39 nouveaux jacarandas à la fin des travaux et fait miroiter une avenue davantage arborée et débarrassée des voitures en surface.
Un arbre « instagrammable »
Les Lisboètes ne sont pas les seuls à apprécier la beauté luxuriante des jacarandas. Les touristes aiment se prendre en photo devant les arbres en fleur et les tapis de pétales violets recouvrant les trottoirs de la capitale lorsqu’ils commencent à tomber, rapporte une dépêche de l’agence France Presse publiée par Le Figaro. L’article signale toutefois que « les jacarandas suscitent parfois quelques critiques en raison des inconvénients provoqués par les fleurs qui, tombées au sol, se décomposent en recouvrant les trottoirs d’une substance poisseuse ».
On peut aussi admirer des Flamboyants bleus (acaranda mimosifolia) en Afrique du Sud où la capitale, Pretoria, a même été rebaptisée « Jacarandas city » avec pas moins de 70.000 spécimens dans ses rues, vante une expatriée française dans les colonnes du Petit Journal. Cette publication gratuite signale qu’un bus touristique propose un circuit dans les principaux quartiers ornés de cette essence à Johannesbourg, la plus grande ville du pays.
Une plante « invasive »
La floraison des jaracandas est comparée à celle des cerisiers au Japon par RFI. La correspondante de la radio internationale à Johannesbourg rapporte qu’ils fleurissent désormais plus tôt dans la saison (en novembre dans l’hémisphère sud) en raison du changement climatique. « On voit la même chose se produire au niveau des pommiers et des poiriers, au sud-ouest du Cap. Et c’est une des façons de montrer que le printemps arrive de plus en plus tôt dans l’année », explique une prof de géographie physique à l’université.
Les fleurs peuvent apparaître désormais dès le mois de septembre, rapporte même un magazine d’affaires de Johannesbourg cité par Courrier International. Et le risque de cette floraison précoce est d’exposer les fleurs au gel, pointe l’article du Daily Maverick. Dans ce cas, il ne serait théoriquement plus possible de replanter des jacarandas en Afrique du Sud car cette espèce s’y est si bien acclimatée qu’elle a été classée comme « invasive » par les autorités. L’article précise toutefois que cette interdiction a été levée dans les villes en 1974, « pour tenir compte de l’attachement de la population à ces arbres ».
À Lisbonne, l’abattage des jacarandas fait souffler un vent de fronde Courrier Internationnal, 28/03/2025.
Le conseil municipal de Lisbonne commence à transplanter des jacarandas The Portugal News, 27/03/2025.
Du bleu et du mauve plein les rues : à Lisbonne, ce phénomène « féerique » enchante les touristes Le Figaro, 28/05/2024.
PRINTEMPS - Le temps des jacarandas Le Petit journal, 15/10/2024.
Afrique du Sud : la floraison précoce des jacarandas, un indicateur visible du dérèglement climatique RFI, 07/11/2021.
En Afrique du Sud, le dérèglement climatique perturbe les jacarandas Daily Maverick, 27/09/2021.