Toute jeune femme, Jocelyne Porcher quitte sa ville natale, Paris, où elle travaillait comme secrétaire à Elf Aquitaine pour vivre à la campagne, en région toulousaine. Elle trouve un nouvel emploi de secrétaire dans une PME et, dans le même temps, commence à élever des poules et des lapins... Séduite par une rencontre avec des éleveurs et des éleveuses de chèvres, elle finit par basculer dans le métier : petit à petit, elle monte un troupeau, passe un BPA, puis finit par s’installer comme agricultrice (production laitière de brebis et vente de fromages).
Beaucoup de bonheur, de passion, mais aussi de travail et de contraintes... Cinq ans plus tard, elle quitte le Sud-Ouest et pose ses valises en Bretagne. Changement de décor.
Alors qu’elle débute des études agricoles (BTA), elle découvre la production porcine. "Gros choc ! Rien à voir avec ce que je connaissais de l’élevage. C’est ce choc, en contraste avec l’émerveillement que j’avais dans mon rapport de travail avec les brebis ou les chèvres, qui est à l’origine de ma démarche de recherche." Les questions se bousculent dans la tête de Jocelyne Porcher : Qu’est-ce que l’élevage ? Ce que je faisais ou ce qu’ils font ? A quoi sert la violence dans les porcheries ? Ai-je une sensibilité particulière parce que je suis une femme ? Parce que je suis néo-rurale ? Questions qu’elle a d’ailleurs travaillées dans sa thèse "Eleveurs et animaux, réinventer le lien", parue en 2002, aux éditions PUF, et qui a reçu le prix "Le Monde la Recherche Universitaire".
Après le BTA, Jocelyne continue un BTS "productions animales", puis enchaîne sur une formation continue d’ingénieur agricole.
Elle comprend alors que son champ de réflexion peut s’inscrire, d’un point de vue scientifique, dans la problématique du "bien-être animal", sujet sur lequel elle commence à travailler avec des chercheurs de l’INRA. "Mais je m’aperçois qu’ils ne connaissent ni l’élevage, ni les animaux d’élevage ni les éleveurs."
Insatiable, une fois son diplôme d’ingénieur en poche, elle s’inscrit en DEA et travaille à la Bergerie Nationale de Rambouillet comme chargée de mission sur le bien-être animal, où elle cherche à mettre en évidence, ce qui deviendra le socle de sa thèse et de son travail ultérieur : le lien de bonheur et de souffrance partagés qui existent entre éleveurs et animaux. Pour la première fois, elle montre que dans les systèmes industriels, les travailleurs souffrent également de la souffrance qu’ils infligent aux animaux. Dès lors, comment tiennent-ils au travail ? Pourquoi ?...
Qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas contre les éleveurs que Jocelyne Porcher est en guerre. Elle cherche simplement à montrer que l’élevage est un métier qui rend heureux, les humains et les animaux. "C’est la vie que je défends, la vraie vie, relationnelle, affective... et la science qui va avec ".
Jocelyne Porcher a su mettre au service de la science, sa passion pour l’élevage et ne cesse de défricher ce nouveau champ de réflexion sur l’intime relation qui se noue entre les hommes et les animaux au travail.
Lire l’entretien de la Mission Agrobiosciences avec Jocelyne Porcher : "L’élevage : plaisir ou souffrance en parge ? "