L’agriculture connectée : entre désir et désillusion
Le marché des nouvelles technologies s’étend et s’ouvre aux différents domaines industriels. A sa fermeture le 2 mars dernier, le 51eme Salon International de l’Agriculture (SIA) a prouvé qu’elles s’invitent aussi dans le quotidien des agriculteurs et éleveurs qui apprennent aujourd’hui à les domestiquer. Cette revue de presse de Maxime Crouchez-Pillot, étudiant de Lettres Modernes et stagiaire à la Mission Agrobiosciences, entend faire connaissance avec ces nouvelles méthodes de travail, et leurs limites.
L’agriculture connectée : entre désir et désillusion
Les Echos, France Bleu, RFI, La Croix, Usbek & Rica.
Les nouvelles technologies à la conquête des champs.
Quels sont ces nouveaux outils qui accompagneront les agriculteurs de demain ? Dans un diaporama explicatif « Demain l’agriculture » du 21 février 2014, Les Echos dressent la liste de ces derniers arrivants. Drones, tracteurs autonomes et applis sur Android sont les stars de la dernière édition du Salon de l’Agriculture, « vitrine d’une filière qui se veut désormais résolument tournée vers l’avenir. Un avenir de plus en plus connecté. » Cette année, les agriculteurs ont fait fort ! France Bleu, le 27 février, publie un article sur le sujet : « Les nouvelles technologies sont un moyen de mettre en avant le travail des agriculteurs ». Quelle aubaine pour le touriste ! Les curieux qui ont parcouru les allées du Salon ont pu s’emparer de simulateurs virtuels. Comme s’ils y étaient, les citadins ont navigué dans les champs et les étables ; ils ont pu participer aux multiples tâches quotidiennes de l’agriculteur et de l’éleveur. Un moyen pour les syndicats, représentés par Gilbert Daverdisse de la Sedima, « de faire découvrir au grand public, via ce dispositif de pointe, une filière en manque d’employés » . Reprenons les campagnes en mains !
Tout cela est très révélateur, car plus qu’un outil de communication, l’étalage de ces nouvelles technologies au SIA prouve que les professionnels agricoles sont de plain-pied dans la modernité. C’est ce qu’affirme RFI : « Ipad, Wifi, GPS et satellites. Les producteurs, les éleveurs, etc, s’aident de plus en plus de la technologie ». Alors quoi ? Finis les après-midi à cheval sur son tracteur ? Que les amateurs de gros cylindres se rassurent, il n’est pas encore question de sortir l’agriculteur de son champ. L’idée est de faciliter son travail, de « [l]’affranchir de certaines contraintes physiques, pénibles, et de mieux répartir son effort, mais surtout de réfléchir à la gestion d’ensemble de l’exploitation. ». Ces technologies sont principalement utilisées pour des analyses du milieu. Dans l’édito du 21 février 2014 de La Croix, Séverin Husson dresse le portrait de Mickaël Jacquemin, un agriculteur qui explique que « le besoin de chaque parcelle [est] calculé par un logiciel informatique ». Maladies, parasites, carences, tout disfonctionnement est détecté et immédiatement signalé à notre homme qui peut réagir. Finalement, un gain de temps pour une meilleure gestion de l’entreprise agricole.
Pas si simple d’être moderne…
Mais, bien sûr, des problèmes se posent. Et pas des moindres. Comment financer ces nouveaux atouts sans se ruiner ? Car, on s’en doute, toutes ces merveilles ont un coût. Parfois très, trop élevé. Les Echos donnent l’exemple du drone, dont l’utilisation revient « à plusieurs dizaines d’euros par hectare, contre 6 à 10 euros pour le satellite ». Et même si du point de vue de l’efficacité, « "le rapport est de 1 à 1.000", selon Emmanuel de Maistre, le jeune patron de Redbird », le quotidien précise que « Le drone n’a pas la prétention de remplacer l’imagerie satellitaire, l’avion ou l’hélicoptère, mais [qu’il] s’inscrit comme un complément. »
Pour surmonter ces difficultés financières, les agriculteurs sont face à des choix. Alors les communautés agricoles réagissent : des alliances se créent. Pour ne pas succomber à la concurrence des très grandes productions, ils financent des projets communs, comme l’achat de drones pour réaliser des analyses coûteuses, ou la mise en place du processus de méthanisation, qui permet aux fermes d’être autosuffisantes sur le plan énergétique voir de devenir productrices d’énergie (gaz, électricité) dans leur localité. C’est le cas de cette ferme que présente les Echos où « le biogaz issu des déchets agricoles et des déjections bovines est directement livré aux habitants des cinq communes voisines. » La solidarité est au centre. A ce propos, le magazine Usbek & Rica, dans son numéro du janvier – mars 2014, met au jour un projet intéressant sur l’autoconstruction en agriculture. « Destiné aux agriculteurs indépendants, mais aussi à tous ceux qui voudraient tenter l’expérience agricole », la revue présente l’exemple du « tracteur libre » pour illustrer le concept de libre circulation des technologies.
Sur leur site Internet, les plates-formes telles que Open Source Ecology et ADABio Autoconstruction, proposent des fiches d’assemblages « libres » pour construire soi-même ses outils de production. Et ce, sans qu’aucun brevet ne puisse brider leur fabrication, leur diffusion ou leur reproduction. On imagine l’économie que pourrait alors réaliser un agriculteur en construisant ses outils, plutôt que de les acheter sur le marché.
Reste à voir si ces solutions sont viables et fiables. Expérience à suivre de près…
La revue de presse, réalisée par Maxime Crouchez-Pillot, pour la Mission Agrobiosciences, le 11 mars 2014.
Sources :
- « Demain l’agriculture », Artelle Goncalves, Les Echos, du 21/02/2014.
- « Les nouvelles technologies s’invitent au Salon de l’Agriculture », Julien Baldacchino, France Bleu, du 27/02/2014.
- « Salon de l’Agriculture : les agriculteurs, des geeks ? », Léa Ticlette, RFI, du 23/02/2014.
- « Salon de l’agriculture : cultiver autrement », Séverin Husson, La Croix, du 21/02/2014.
- « Les drones débarquent porte de Versailles », Marte-Josée Cougard, Les Echos, du 21/02/2014.
- « Lifetrac, Le tracteur libre », Salim Santa-Lucia, Usbek & Rica, n°8, Janvier-Mars 2014, p12-13.
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