Au début, elle n’avait pourtant pas grand-chose pour attirer, au niveau mondial, les « sunlights » de sa filière et les premiers chercheurs, à la fin des années 50, qui débarquèrent sur les causses aveyronnais pour s’y intéresser restèrent un temps dubitatif en observant l’animal. Celui-ci est haut sur pattes, hyper léger, rustique, avec une laine si courte et si peu abondante qu’elle ne lui recouvre ni la tête, ni le ventre. Quant à ses performances laitières, rien de bien extraordinaire. Côté famille, elle appartient à une vaste branche ovine broutant depuis des lustres dans le sud du Massif Central et des Alpes ainsi que dans le nord de l’Espagne. Elle et ses « cousines » aragonaises, tarasconaises ou « Blancs de Lozère » partagent des points communs : un net penchant pour les terrains secs et la marche à pied, le goût pour la vie sédentaire et un régime alimentaire calqué sur les productions saisonnières.
Mais quelles sont donc les prouesses de notre brebis ? Il y en a plusieurs.
D’abord, sa faculté de faire des agnelages à des périodes différentes des autres races et l’excellent rythme de croissance des agneaux. Une spécificité qui ferait le bonheur des éleveurs à viande et qui nous laisse penser qu’il y aurait là comme une erreur de vocation : pourquoi lui demander de faire du lait ? D’ailleurs, on commença par évaluer ses concurrentes - des Sardes ou des allemandes Frisonnes -, mais ce bilan global, intégrant des critères essentiels tels que l’adaptation au milieu et les habitudes alimentaires, propulse la Lacaune largement en tête du casting.
Sauvée. Dès lors, reste à augmenter leur productivité.
Avec les éleveurs, une poignée de scientifiques de l’Inra collecte les informations sur chaque animal et sélectionne les mères les plus performantes et les meilleurs béliers - ces derniers sont une cinquantaine au début à être rassemblés dans le haras de Saint-Affrique, contre 500 aujourd’hui - avec traitement informatique des données dès...1957. Connaissances génétiques aidant - cette science n’en est à l’époque qu’à ses premiers pas -, le résultat arrive enfin : de 1970 à 1990, la production de lait triple et ses qualités fromagères s’améliorent pour fonder l’extraordinaire essor du fameux fromage persillé.
Le Roquefort
Bien qu’objet d’une longue tradition, affiné dans des caves du 17è siècle et AOC depuis 1925, le Roquefort n’a en effet percé économiquement au niveau national et international que dans les années 70. Souvenez-vous, c’était l’époque du slogan « Roquefort d’abord, Roquefort d’accord »... Entre temps, l’amélioration génétique du cheptel de Lacaune fait figure de référence et de modèle mondial tout en ayant permis de développer une race locale typique des causses.
Histoire de... Mission Agrobiosciences. 20 Octobre 2006.