05/11/2025
Revue de presse du 5 novembre 2025
Nature du document: Revue de presse

Le feu couve toujours sous les panneaux solaires

Un an après le lancement à Manosque du grand rush des centrales photovoltaïques au sol (lire : "Agrivoltaïsme : des campagnes survoltées", revue Sesame), les projets fleurissent et les oppositions ne désarment pas. Les agriculteurs locaux restent globalement méfiants et apparaissent divisés sur les bénéfices attendus de « l’agrivoltaïsme », selon les régions... et leur situation financière.

L’incendie XXL qui a parcouru 17.000 hectares dans le massif des Corbières a réveillé les tensions dans le département de l’Aude autour du projet d’un méga-parc solaire dans les environs des villages de Fabrezan et Camplong. La société Valéco, basée à Montpellier, s’apprête à déposer un permis de construire qui pourrait s’étendre sur 135 hectares, rapporte Libération. La cave coopérative de Camplong et de nombreux vignerons du secteur attendent beaucoup de l’arrivée des panneaux photovoltaïques. Valéco aurait proposé jusqu’à 7.000 € par hectare, « compatible avec l’aide à l’arrachage des vignes », précise Mathilde Roche, envoyée spéciale du quotidien national. L’entreprise prévoit de faire paître jusqu’à 800 moutons sous les panneaux pour un projet qui se veut exemplaire des nouvelles perspectives offertes par « l’agrivoltaïsme ».

Mégaprojets et précarité

« On leur dit depuis le début : s’il n’y a pas d’eau pour les vignes, vous allez les abreuver et les nourrir comment, vos moutons ? » soupire Nadine Franjus. Présentée comme œnologue, cette militante d’une association d’écolos des Corbières et du Minervois assure qu’elle n’a rien contre l’énergie solaire, mais se déclare effarée par l’ampleur pris par le projet Valéco. A l’origine, l’entreprise ne prévoyait d’installer ses panneaux que sur 50 hectares « en friche » en couvrant les anciens bassins de décantation de la cave coopérative. « L’appât du gain » a fait enfler le projet jusqu’à 200 hectares, résume Libération. Pour mieux faire passer son projet, Valéco n’évoque plus qu’une trentaine d’hectares couverts par ses panneaux et promet de planter des arbres pour les dissimuler dans le paysage.

Entre le Vaucluse et le Gard, les vignerons des Côtes du Rhône ont finalement décidé d’interdire purement et simplement l’agrivoltaïsme, rapporte Vitisphère. Selon le président du syndicat des vignerons cité par le site spécialisé, il était pourtant prévu à l’origine d’implanter des « démonstrateurs » de 10 à 20 hectares « maximum » dans le vignoble. Mais le syndicat se dit submergé par les offres des énergéticiens. « On se retrouve dans la situation où l’on n’a pas d’autre choix que de l’interdire pour éviter de voir des centaines d’hectares couverts en une année », explique Damien Gilles, viticulteur de Pont-Saint-Esprit (Gard). Ce coup d’arrêt au « vitivoltaïsme » est une première en France, souligne Alexandre Abellan, toujours dans Vitisphère. Les appellations Côtes-du-Rhône et Côtes-du-Rhône Villages « sont confrontées à ce sujet à cause de la précarité des revenus de leurs producteurs », souligne le rédacteur en chef du site spécialisé.

« Poste source » et menaces sur un captage dans les Alpilles

Les résistances locales aux centrales photovoltaïques au sol ne concernent pas que les projets tentant d’associer les agriculteurs. Dans le Var, six recours ont été déposés contre 23 hectares de panneaux dans une commune située sur les hauteurs de Grasse, signale Ici Azur. Le maire de Valderoure (500 habitants) est pour, mais une association de préservation du cadre de vie des Alpilles s’inquiète pour le périmètre de captage d’une source dans cette région karstique, explique la radio locale. La chambre d’agriculture des Alpes-Maritimes a elle aussi déposé un recours. Les panneaux seraient installés au milieu des pins, « dans un paysage idyllique et serein », rapporte France 3 PACA.

La télévision régionale souligne que la source qui serait menacée alimente 11 communes des Alpes-Maritimes et du Var. Maire d’un village varois concerné, Raymonde Carletti ajoute, dans Var Matin, que la source alimente une rivière qui sert à l’irrigation pour l’agriculture. « Il y a d’autres terrains pour faire des parcs photovoltaïques sans les faire sur une source qui alimente des villages ! S’il n’y a plus de source demain, le Golf de Taulane pourrait fermer… Il y est question de 60 emplois », s’inquiète l’élue de La Martre (200 habitants). Outre le projet de 23 ha d’une filiale du groupe Engie, c’est une cinquantaine d’autres projets de parcs photovoltaïques qui serait raccordée au « poste-source » de Valderoure, selon l’association locale de défense du cadre de vie, citée par le quotidien régional.

Par Stéphane Thépot, journaliste

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