Le dernier vagabondage de Didier Houguet

Inclassable Didier Houguet, qui vient de nous quitter. Fait de fulgurances et de lambeaux de brume, de sourires d’enfant et de gouaille parisienne, d’une colossale érudition et d’une tendresse pudique, clochard céleste à la Kérouac, tour à tour boute-en-train et vagabond solitaire, bivouaquant dans l’ivresse des livres et du marché d’Aligre.
Il aurait adoré être voyou, il a fait latin grec.
Tenter de le résumer en une biographie serait lui faire injure. L’agrégé de lettres et l’énarque se faisait Courteline quand il évoquait, dans un flot de traits hilarants où l’autodérision tenait bonne place, ses débuts en Corrèze ou à la sous-préfecture de Castelsarrasin. Eminence grise, conseiller de l’ombre, électron libre, il a été de tous les cabinets, chez Tasca ou Guigou, à l’Agriculture comme aux finances et, surtout, fidèle d’entre les fidèles auprès de Hervé Gaymard. Ces derniers temps, à Bercy, l’intitulé de sa fonction semblait irréel tant il sonnait comme une courtelinade de plus : conseiller du haut fonctionnaire de terminologie et de néologie…
Sa brillance discrète a émaillé les aventures de la Mission Agrobiosciences, tout particulièrement aux Controverses de Marciac où on le vit souvent, auditeur attentif, regard gourmand. Où on l’entendit aussi, de temps à autres, émettre calmement une réflexion salvatrice, une saillance tranquille qui aidait à nous ressaisir. Tu vas nous manquer, l’ami.