25/10/2007
Les actes de la 8ème Université d’été de l’Innovation rurale. Marciac 2002

« 9 Paroles d’agriculteurs sur le thème : Agriculture entre contrats et contrôles ». Dans le cadre de l’Université d’été de l’Innovation Rurale. Marciac 2002.

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1. Quelle place pour le citoyen dans le débat agricole ?

Par Patrick Kirchner, ancien président de l’association « Solidarité Paysans ». Elle réunit les associations locales de défense des agriculteurs en difficulté en France.

Solidarité Paysans est une association nationale de défense d’agriculteurs en difficulté, relayée dans certains départements et quelques régions. Son but : faire accéder les agriculteurs en difficulté à tout ce qui est juridique, car la judiciarisation de l’agriculture est plus en plus importante. Par exemple, nous les aidons à se défendre contre certains contrats, contre certains fournisseurs et à améliorer leur situation financière.
Car il faut savoir que l’agriculteur est une des personnes qui signe le plus de contrats dans sa vie active, que ce soit sur la maîtrise de son moyen de production, sur le sol, sur les emprunts, surle matériel, sur le type de production, sur les ventes. Or, la formation agricole ne propose par de cours juridique ou sur ce qu’est un contrat, comment on le lit.
Par rapport aux propos tenus ce matin, je suis un peu surpris qu’on lie l’agriculture et le consommateur, comme si aujourd’hui il y avait une agriculture obligatoirement reliée au consommateur. Une grosse partie de la production agricole va quand

même à l’industrie. Et ça me gêne un peu qu’on parle d’agriculture, parce qu’il y a plusieurs agricultures, donc différents contrats. Certaines agricultures ne sont absolument pas liées aux consommateurs, d’autres oui.
Concernant les gens avec lesquels les agriculteurs peuvent signer des contrats, on trouve la grande distribution. On passe aussi des contrats industriels, d’autres avec des firmes en aval ou amont, comme des coopératives. Il y a donc différents types de contrats, différents types de personnes avec lesquelles on peut les signer et à différents niveaux. Ensuite, l’agriculteur peut être lui-même moteur de son type de production. En agriculture biologique, par exemple, ce sont les producteurs qui ont défini les cahiers des charges et les ont entérinés. Reste les contrats, obéissant à des contrôles pour garantir des produits de qualité. Ce sont l’agriculture biologique, les AOC... Ces cahiers des charges avec l’Etat et avec des sociétés de contrôle sont faits en concertation.

L’agriculteur est une des personnes qui signe le plus de contrats dans sa vie active

On a parlé tout à l’heure de l’agriculture raisonnée. A mon sens, elle n’a rien à voir avec l’agriculture durable, qui est bien précise, avec un cahier des charges proche de l’agriculture paysanne, se négociant dans des commissions nationales, voire régionales et départementales, avec le ministère de l’Agriculture, aujourd’hui composées de représentants de l’environnement, de représentants de consommateurs, donc d’une partie de la société civile. Ces contrats se veulent de plus en plus complets, c’est-à-dire qu’ils incluent le mode de production, mais aussi l’emploi. On le voit dans les CTE, ils incluent l’environnement et le consommateur. Sauf que la société civile n’est pas forcément d’accord avec l’orientation de certains types de production agricole, je pense bien-sûr aux OGM, alors que l’Etat maintient l’essai de ces cultures. On est donc en droit de se demander quelle place le citoyen a aujourd’hui dans le débat agricole.
Dernier point. J’ai entendu dire que l’agriculteur est en amont de tous les contrats. Cela change. Certaines firmes voudraient bien que l’agriculteur soit en aval de la production. Justement, avec les OGM, l’agriculteur n’est plus en amont de la chaîne mais il devient un faire-valoir de sociétés semencières. Une situation proche de celle des années 60, quand en Bretagne, des agriculteurs se retrouvaient simples ouvriers de gros groupes coopératifs, sauf que quand il y avait un problème, de vente des productions par exemple, il était le seul à payer les pots cassés, pas la coopérative. Un gros combat syndical a montré à l’époque que l’agriculteur n’était plus maître chez lui mais qu’il était intégré. On a d’ailleurs obtenu qu’en tant qu’agriculteur intégré il ne soit pas responsable de ces dettes

« 2. Nous avons toujours eu la volonté de travailler avec des gens extérieurs à la profession : chercher, se remettre en cause, relever des défis, c’est l’intérêt du métier. Le contrat peut aider à prouver que l’on fait mieux en décuplant certaines mesures et en permettant d’obtenir ainsi des résultats tangibles sur l’ensemble d’un territoire. »

Par Henri Frémont. Il cultive 110 hectares de céréales à Chemillé-sur-Indrois en Touraine. Il est président d’un Groupement de Développement Agricole (GDA) dont le travail sur la qualité de l’eau a débouché sur un CTE collectif et a été reconnu, en 2001, par le prix de la fondation Pierre Sarrazin.

Producteur de matières premières (graines de blé, d’orge, tournesol, colza), Henri Frémont ne se préoccupe pas de transformation ou de vente directe, sa problématique est environnementale. Au sein du GDA de Loches Montrésor, qui réunit 180 exploitations (représentant 2/3 de la SAU) situées sur un bassin versant de 3 000 hectares, il cherche à concilier activité agricole et qualité de l’eau : « De 1990 à 1998, nous avons réduit les intrants de 30% en diminuant les doses et en ajustant les périodes d’application. Cette action a rencontré ses limites. Pour aller plus loin, il nous fallait travailler autrement. Avec l’aide de scientifiques, nous nous sommes intéressés à la biodiversité, pour réapprendre à utiliser le sol comme vivant, alors qu’avant, dans les années 80, nous l’utilisions comme support : tout ce que le sol peut de lui même générer, c’est ça de moins à apporter. On peut par exemple favoriser la présence de carabes, ces prédateurs naturels des limaces, plutôt que de les détruire avec un produit de traitement... L’expérimentation du groupe a porté également sur la réintroduction de cultures utilisant des matières actives spécifiques afin de diminuer les phénomènes d’accoutumance, et sur la couverture des sols nus en hiver : après la minéralisation du sol à l’automne, les premières pluies entraînent l’azote par ruissellement et infiltration, nous avons cherché quelles étaient les inter-cultures les plus adaptées afin de limiter ce phénomène. »
Pour évaluer l’impact de ces mesures et d’une manière générale celui de l’agriculture sur le territoire, le Groupement a commencé à réaliser des analyses d’eau, chaque mois, à partir d’un point zéro : « Nous pouvons ainsi comparer les résultats en fonction de la pluviométrie, des dates d’application, et vérifier si la modification de notre façon de travailler va vers le mieux. » Cette démarche a trouvé dans le CTE l’occasion de se prolonger. « Le Groupement était un peu à cours d’idées. Le CTE nous est apparu comme un formidable outil de développement par lequel notre expérience était primée, pouvait être financièrement soutenue et étendue (le GDA couvre 18 communes et deux cantons). En 2000, nous avons élaboré un projet collectif de CTE axé sur la qualité de l’eau, ce qui concordait avec les priorités départementales. Nous y avons introduit un diagnostic environnemental plus poussé que le diagnostic minimal prévu et deux mesures obligatoires : la couverture des sols nus l’hiver et l’allongement des rotations avec introduction de nouvelles cultures. Ces mesures simples et efficaces permettent qu’un maximum d’agriculteurs s’engage : 1/3 des adhérents ont signé un CTE et les 2/3 devraient le faire dans l’année. Par l’addition de « petits plus », on peut espérer des effets concrets sur la qualité de l’eau. »
Henri Frémont est un convaincu du bienfait du CTE en particulier et du contrat en général : « L’avenir de l’agriculture ne passera que par ce type de contrat, avec l’Etat ou avec la société : il est la reconnaissance de l’action de l’agriculteur sur un paysage. L’entretien du paysage a une valeur qui ne peut pas être pris en compte si on nous demande de produire du blé au prix mondial. Je ne crois pas au revenu de l’agriculteur par le produit et par le prix pour ce type de production, je crois à la multifonctionnalité. Si on veut que l’engagement soit durable, le contrat et le contrôle sont nécessaires, je n’y vois pas d’inconvénient. Mais pour que les gens signent un contrat, les deux parties doivent s’y retrouver, avec un minimum de confiance dans la relation : que dans la négociation, par exemple avec les administrations, l’objectif ne soit pas « d’avoir » l’autre. » Le contrat peut se révéler être alors un outil de développement local : « Nous avons toujours eu la volonté de travailler avec des gens extérieurs à la profession : chercher, se remettre en cause, relever des défis, c’est l’intérêt du métier. Le contrat peut aider à prouver que l’on fait mieux en décuplant certaines mesures et en permettant d’obtenir ainsi des résultats tangibles sur l’ensemble d’un territoire. »

« 3. j’ai un sentiment de manque de reconnaissance, du fait de l’éloignement entre producteur et consommateur. J’ai signé un contrat qui implique une façon particulière de conduire mon exploitation, une moindre utilisation de la chimie, etc., mais je n’ai pas l’occasion de le faire savoir, de l’expliquer »

Par Christophe Capdecomme. Il élève 100 Charollais sur 82 hectares, à St Christaud dans le Gers. Il fait partie du Groupe local de réflexion de Marciac, s’est converti au « bio » en 2001 et vient de signer un CTE

« Je suis installé sur une zone de coteaux, non intensive. Mon père faisait de l’ensilage mais restait dans une logique de productivisme modéré. Quand j’ai repris l’exploitation, j’ai augmenté la surface, ce qui m’a permis de passer à un système plus extensif et de baser davantage l’alimentation sur le foin et le pâturage. Depuis longtemps j’avais l’idée de me convertir au bio, j’étais convaincu que l’emploi de produits chimiques posait de gros problèmes : ces têtes de mort sur les bidons des produits de traitement, ça m’a toujours inquiété. Je me suis converti en décembre 2001. L’objectif était d’améliorer encore la qualité, les techniques de production, le goût, et d’être dans une continuité de préservation de l’environnement. D’un point de vue économique, les résultats sont aussi bon qu’auparavant. Je commercialise l’essentiel de ma production auprès d’une grosse coopérative, Vidadour. Mais je tente de diversifier les débouchés en faisant un peu de vente directe : un restaurateur m’achète des bêtes de temps en temps, au tarif bio. Ce qui ne l’empêche pas de proposer des repas à dix euros, entrée et dessert compris ! Il ne met pas forcément en avant l’argument bio, il apprécie le produit et réussit à le valoriser. Cela est possible seulement dans un circuit court, sans intermédiaires. Il y a un lien qui se crée par la vente directe : il n’y a pas de contrat entre nous, sinon de confiance et de reconnaissance.
Par ailleurs, je viens de m’engager dans un CTE environnemental qui prévoit une gestion extensive des prairies, l’entretien et la reconstitution de haies, une gestion particulière des zones humides et notamment des prairies à orchidées... Le CTE m’a aussi permis de consolider l’emploi Cotorep de mon frère, salarié de l’exploitation.
Malgré tout, j’ai un sentiment de manque de reconnaissance, du fait de l’éloignement entre producteur et consommateur. J’ai signé un contrat qui implique une façon particulière de conduire mon exploitation, une moindre utilisation de la chimie, etc., mais je n’ai pas l’occasion de le faire savoir, de l’expliquer. J’ai un vrai retour quand un client me dit : ta viande est super bonne ou, comme récemment : surtout ne change pas de métier ! Mon travail en est valorisé moralement. Mais il manque l’histoire du produit. Ce serait une bonne chose qu’un prochain contrat, avec des individus ou avec la société, permette de reconnaître cela. »

« 4. Le contrat a lieu entre les consommateurs actionnaires, mais il n’y a pas de contrat signé entre la coopérative et les fournisseurs. La connaissance dispense du contrat écrit, à l’inverse le contrat peut être un outil de défiance s’il se substitue à la connaissance. Les gens sont responsables si on leur donne les moyens de l’être »

Par Mathieu Calame. Gérant d’un domaine rural appartenant à la fondation « Charles Léopold Meyer pour le progrès de l’homme », en région parisienne : 800 hectares dont 400 dévolus à l’agriculture. Il a encouragé la création d’une coopérative de consommateurs.

Une conduite durable, répondant aux enjeux de société présents et futurs : telle est la mission qui fut proposée à Mathieu Calame en 1994 par le conseil d’administration de la Fondation, pour gérer le domaine de Chaussy. « L’objectif, explique Mathieu Calame, ne se limite pas aux aspects agricoles mais englobe les questions de citoyenneté, d’intégration des jeunes, d’équilibre mondial, d’environnement... il y a interdépendance entre tous ces aspects : c’est l’esprit de système contre l’esprit de filière... » Dans un premier temps, appliqué à l’exploitation, l’objectif durable s’est traduit par la réintégration d’animaux (vaches salers, moutons suffolk-mérinos) associés à des rotations longues de cultures céréalières (blé panifiable...) et le choix du bio : « C’est à la fois un créneau de production et une autre approche du rapport de l’homme à la nature, imprégnée d’un romantisme qui me plaît... »
Rapidement, s’est présentée l’occasion de repenser les relations avec le consommateur : « Nous avions envie de ne pas rester dans notre coin, d’aller plus loin, en établissant des liens avec les quartiers urbains, par la vente directe. Nous avions le choix entre être le pivot de ces échanges ou favoriser une logique contractuelle entre des consommateurs. Or je crois beaucoup à l’esprit de coopération, à l’idée que l’homme seul ne peut rien mais qu’en se liant à d’autres, il sort de l’impuissance et créé du pouvoir. » C’est ainsi que vit le jour le 10 mars 2001 la Société civile coopérative de consommation « Saveurs du Vexin », réunissant aujourd’hui 130 coopérateurs, qui s’approvisionnent auprès de plusieurs producteurs et ont choisi un slogan : Mettez un visage et un paysage sur votre consommation. « L’action d’acheter est devenue vide de sens alors qu’elle peut être riche, le consommateur devient alors un « consomm’acteur » qui peut échapper au binaire oui-non de l’achat, formuler autre chose et poser des actes créateurs de nouvelles opportunités... La coopérative est de ce fait un lieu de compromis, bourré de tensions et de contradictions... » Après discussions, les coopérateurs ont par exemple choisi d’acheter à parts égales des morceaux des trains avant et arrière de l’animal - car responsables de toute la vache produite - plutôt que de ne prendre que les morceaux les plus nobles à un prix plus élevé. Il y eût un débat similaire sur la tendreté de la viande, qui pouvait être améliorée par l’introduction d’un gène culard à la salers, sachant que cela entraîne de fréquentes césariennes. Là encore les consomm’acteurs ont préféré une moindre tendreté au nom du bien-être animal. « On a le consommateur qu’on mérite, commente Mathieu Calame, si on a un esprit militant, le consommateur est militant, si on est dans l’esprit « économie de marché », on a en face de soi des clients. Les gens sont des miroirs de ce que l’on pense d’eux. Ils ont envie de sens, ils ne veulent plus être des ouailles, mais des partenaires d’un projet commun que l’on consulte en amont. Ainsi, l’on sort d’un mode référendaire pour passer à un mode actionnarial, qui procure une capacité à formuler une « tierce voix. »
Le fait d’établir un contrat va aussi dans le sens de la responsabilisation : « Il n’y a jamais eu de contrat entre l’agriculture et la société. Nous étions dans une société d’ordre avec des missions définies par l’Etat. La société de contrat - ce qui s’est dit entre nous, ce qui a été convenu -, s’oppose à la société d’ordre. Cela signifie un affaiblissement de l’Etat mais aussi un passage à l’âge adulte : on se met d’accord entre grands, il y a égalité entre nous. Il n’y a plus de statut, il n’y a que de la négociation. Le maître mot, c’est la réciprocité-liberté, le donnant-donnant, où chacun aliène une même dose de liberté... Pour ce qui nous concerne, le contrat a lieu entre les consommateurs actionnaires, mais il n’y a pas de contrat signé entre la coopérative et les fournisseurs. La connaissance dispense du contrat écrit, à l’inverse le contrat peut être un outil de défiance s’il se substitue à la connaissance. Les gens sont responsables si on leur donne les moyens de l’être, de l’information... »
A défaut de contrat écrit, c’est bien l’esprit de contrat qui prévaut entre la coopérative et le domaine : « Quand vous réunissez des gens, quand vous leur parlez, honnêtement, avec respect, en disant : « je crois que tu vas comprendre », c’est différent du discours de l’expert qui dit « il faut que vous pensiez ce que l’on pense », dans ce cas on est dans l’endoctrinement. » Mathieu Calame défend une autre posture, qu’il résume ainsi : « Que pensez-vous, que pensons-nous et pouvons-nous penser quelque chose ensemble ? »

« 5.Pendant les trente dernières années l’agriculture a été marginalisée : nous étions là, avec nos troupeaux, pour maintenir l’environnement, presque comme des éléments du décor. La pression foncière et touristique nous réduisait à une portion congrue. Avec cette AOC, on reprend l’initiative dans l’économie locale »

Témoignage de Marie-Lise Broueilh. Elle élève 200 brebis à Esquieze-Sere dans les Hautes-Pyrénées et oeuvre depuis 1996 à l’obtention d’une AOC, en passe d’être délivrée

Dans le pays Toy, au cœur des Pyrénées, on élève depuis des siècles la barégeoise, une race rustique de brebis, en symbiose avec son territoire, nourrie l’été des prairies et pâturages de montagne et l’hiver de fourrages. « Sa viande a l’arôme de la flore du terroir, serpolet, réglisse, raconte Marie-Lise Broueilh, mais elle n’est pas forte... » La Barégeoise est spécifiquement reconnue pour deux types de produits : la jeune brebis de boucherie et le mâle castré, appelé « le doublon ». « Nous sommes dans une vallée touristique où il y a un marché local. Les bouchers connaissent nos produits, mais ceux-ci n’étant pas identifiés en tant que tels dans les étalages, ils commençaient à introduire des bêtes d’ailleurs et les commercialisaient comme provenant du pays. Il y avait aussi des croisements avec d’autres races qui modifiaient le goût de la viande. Les éleveurs ont réagi à cela, car ils avaient le sentiment de servir de faire valoir alors que le consommateur ne pouvait pas s’y retrouver et que notre savoir-faire particulier était dévalorisé. » Un groupe d’agriculteurs - une dizaine au départ, aujourd’hui vingt-six sur les cent éleveurs du canton - a décidé de s’organiser pour maintenir la qualité de ces produits et faire reconnaître leur authenticité. « Il y a eu des tentatives de vente directe, mais elles ont échoué. Nous avons alors décidé d’essayer d’obtenir une Appellation d’Origine Contrôlée Barèges-Gavarnie, car le lien au terroir nous semblait évident. Nous avons interpellé l’INAO qui nous a confirmé que nous réunissions les conditions pour entamer cette démarche. Nous nous sommes attelés à la rédaction du cahier des charges. Il a fallu répertorier ce que nous faisions, comment nous le faisions, y compris dans le détail. Cela a été un exercice très formateur pour les éleveurs car c’était l’occasion de porter un regard, une réflexion sur nos actes, notre métier, et nous avons pris conscience de la valeur de notre travail. »
La constitution du dossier AOC a été un long parcours, qui a réuni différents partenaires : techniciens de la chambre d’agriculture, syndicat départemental ovin, UPRA des Pyrénées centrales, mais aussi les communes du canton qui se sont investies dans la construction d’un abattoir, le cahier des charges prévoyant l’abattage des bêtes dans la zone de production.
Codifiant volontairement leur activité, les éleveurs n’ont pas eu le sentiment de limiter leur liberté : « La situation n’était pas infantilisante, au contraire, elle était très constructive. Ainsi, c’est la filière elle-même qui a mis au point un système de traçabilité et de contrôle, avec identification et suivi de la carcasse. Les éleveurs seront parties prenantes des commissions des agréments des animaux vivants et de certification des carcasses. Nous étions demandeurs, en position d’acteurs, au nom de notre avenir. Il n’y a pas eu d’obligation de contrat. Le cahier des charges ne changera rien puisque nous sommes partis de ce que nous faisions. S’il peut y avoir des réticences à s’engager dans un contrat, elles vont s’atténuer car il devrait y avoir au final une plus value financière »
L’avant projet du décret d’appellation a été validé au début de juillet 2002 et le décret définitif devrait être pris d’ici la fin de l’année. « Au bout du compte, l’AOC sera un moyen de pérenniser le système d’élevage. La démarche est valorisante aussi parce que nous répondons à la demande du citoyen : nous pourrons proposer et garantir un bon produit, dont nous sommes fiers. Cela contribuera à une image positive des éleveurs. » Marie-Lise Broueilh estime enfin que l’obtention de l’AOC aura des retombées en termes de développement local : « Pendant les trente dernières années l’agriculture a été marginalisée : nous étions là, avec nos troupeaux, pour maintenir l’environnement, presque comme des éléments du décor. La pression foncière et touristique nous réduisait à une portion congrue. Avec cette AOC, on reprend l’initiative dans l’économie locale. Nos produits pourraient devenir emblématiques du territoire et contribuer à une dynamique : ils pourront être mis en valeur aussi bien par les restaurateurs que par le tourisme à travers par exemple l’organisation de circuits de découverte. Nous ne serons plus seulement une caution philosophique et environnementale mais des partenaires à part entière du système d’économie locale. »

« 6. En définissant nous mêmes des contraintes, librement débattues, nous prenons notre destin en main et nous passons un contrat, vis-à-vis de nos fournisseurs mais également avec la société civile puisque les engagements sont publics »

Par Arnaud Abord de Chatillon. Il exploite 150 hectares de résineux, dans le Morvan... en plus d’être fonctionnaire. Il a suscité un système de certification de développement durable pour les forêts françaises, déjà appliqué en Bourgogne.

« La forêt française est dans une problématique de « riches » : sa surface a doublé depuis napoléon III ! alors que partout ailleurs dans le monde - Amazonie, pays de l’Est... - les surfaces forestières diminuent. » Voici le contexte exposé par A. Abord de Chatillon, président de l’Union régionale des syndicats forestiers et président de la toute récente Association Bourguignonne de Certification Forestière (ABCF).
Il se présente comme sylviculteur et même entrepreneur sylviculteur : « Comme les agriculteurs, nous avons des choix de gestion à faire qui demandent technicité, connaissance, mais qui ont des implications à 50 ou 200 ans... » Le choix, dans le Morvan, a été de planter du pin Douglas, depuis la fin des années 50. Venu des Etats-Unis, ce bois rouge est encore un petit nouveau sur les marchés internationaux mais, appréciant les caractéristiques du sol et de pluviométrie de la région, il est devenu dominant sur certaines portions du territoire bourguignon : « On est passé de friches à des forêts compétitives. Des gens ont imaginé leur forêt, dans une démarche volontariste. Ils continuent à la modeler, par les plantations - la décision principale est le choix de l’essence -, par l’entretien : aujourd’hui on élague jusqu’à atteindre 300 arbres par hectare, il y a une baisse de la densité. Le mode de management a évolué : dans les années 60, on sur-plantait avec 3 à 4000 pieds par hectare pour en obtenir au final 3 à 400. Aujourd’hui, on en plante 1 000 pour le même objectif ( les plans coûtent plus cher...). Mais deux éléments nous on conduit à réagir : la tempête de 1999 et la contestation écologique. Le forestier a été taxé de spéculateur, accusé de réaliser des coupes superflues et de transformer le paysage par l’introduction des résineux persistants, bien que dans le Morvan les feuillus restent à 60% majoritaires. Nous avons réfléchi à des conduites qui soient mieux acceptées par la société, avec l’idée d’éco-certification, qui existe dans d’autres pays européens. La difficulté en France était le morcellement car elle compte quatre millions de propriétaires forestiers, 165 000 pour la seule Bourgogne. Alors qu’ailleurs, les surfaces sont gérées par de grandes compagnies forestières (60-70.000 ha) qui sont cotées en bourse. En France, seule l’ONF avait la taille minimale requise pour prétendre à un logo de certification international comme WWF. Nous avons finalement fait le choix du logo européen PEFC (60% de la certification du marché mondial), en adaptant le système aux petites surfaces, y compris d’un hectare. » Pour ce faire, est créée l’ABCF qui réunit une trentaine de producteurs et comprend trois collèges : producteurs, utilisateurs, société civile (randonneurs, associations, chasseurs...). « Réunis autour de la table, ces trois collèges ont défini quinze engagements du forestier bourguignon, les mêmes pour tous, privé ou public, comme si la forêt bourguignonne (un million d’hectares) appartenait à un seul propriétaire. Cette certification, valable pour cinq ans, comprend des engagements écrits en faveur de l’écologie, du social, de l’économie. 12-13% de la forêt bourguignonne est déjà certifiée et 40% pourraient l’être à terme. Quatre ou cinq autres régions françaises sont en train de décliner ce système... ».
Sans aucun doute, pour A. Abord de Chatillon le contrat est un atout : « En définissant nous mêmes des contraintes, librement débattues, au delà de la réglementation du code forestier (qui par exemple ne met pas de limites aux coupes rases), nous prenons notre destin en main et nous passons un contrat, vis-à-vis de nos fournisseurs mais également avec la société civile puisque les engagements sont publics (et pourraient être prochainement identifiés par un système de pancartes). On peut espérer ainsi que les forêts seront à terme dans un meilleur état, et que le bois, bénéficiant d’une marque mondiale de durabilité, sera mieux à même de trouver sa place sur les marchés. »

« 7. Le contrat à l’ancienne, on tape dans la main, c’est un contrat d’hommes libres. Plus on passe de contrats forcés, plus cette liberté s’en va : je ne saurais pas m’engager dans un prévisionnel sur 5 ans, et remplir dix fois la même déclaration me pèse... »

Par Philippe Roucan. Il élève 60 salers (et leur descendance) à Lacapelle Segalar, dans le Tarn. Il pratique la vente directe depuis 5 ans.

Quand Philippe Roucan commence à parler de ses vaches, il est pris d’un ravissement : les yeux brillent, la bouche rigole et on dirait que même le ventre - qu’il a rond - se met à danser. Comme s’il n’en revenait pas de faire chaque jour ce qui le comble : « Je suis passionné par la salers, qui est belle et bonne : ses cornes en lyre, la forme de sa tête, sa couleur rousse... sur l’herbe. Le tout rehaussé par le son des cloches qu’on leur attache au cou... Elle est aussi très amicale, elle aime l’homme car elle a été habituée à être manipulée par lui pour différents usages : le lait, la viande, l’attelage... Si je suis énervé et que je vais voir mes vaches, j’en reviens paisible. Cette race est aussi rustique, prolifique et vêle facilement. Et la viande ! est persillée à souhait... »
Philippe Roucan a une haute et fière idée de son métier : « Nourrir, éduquer, soigner sont les fonctions premières à remplir pour l’homme. Or éduquer est possible seulement si la nourriture est assurée. Rappelons nous que dans le monde un tiers des gens meurt de faim (un autre tiers mange correctement et un tiers mange trop !). Quand on produit de la nourriture, on fait quelque chose d’essentiel à la vie, c’est une grande responsabilité. Ce que j’amène aux gens participe à leur santé. Nous, les agriculteurs, sommes en cause dans la perte de confiance des consommateurs. Ce qu’on leur fait manger, ce n’est pas forcément ce que l’on fait manger à ses enfants, et dans ce cas, on n’est plus dans notre métier. Si je respecte mon animal et ma terre, cela se retrouve dans mon produit et je respecte la personne qui est en face de moi. Je n’ai que le respect que j’ai donné. »
Parce qu’il a voulu valoriser ses produits à la hauteur des efforts consentis, augmenter sa marge et se rapprocher du consommateur, Philippe Roucan a décidé de pratiquer la vente directe, il y a 5 ans. Par besoin également d’un retour plus immédiat et plus positif : « Je n’avais un retour du boucher que quand ça allait mal et il en profitait pour diminuer le prix d’achat de la carcasse suivante ! Aujourd’hui, j’effectue moi-même des livraisons sept ou huit fois par an à Paris, Marseille, Narbonne... Les gens viennent aussi sur place... et le courant passe. Ils constatent les bonnes conditions d’élevage : que les animaux vivent de pâturage, qu’ils disposent d’un bois de 10 ha, bien utile car il y fait frais l’été et ils y trouvent une variété alimentaire... Toutes mes vaches ont un nom, les veaux aussi, cela surprend car les gens pensent que l’agriculture aujourd’hui fonctionne seulement avec des numéros. Et de voir ces vaches qui déambulent comme des reines, leur noblesse, marque à jamais l’imaginaire du consommateur ; la vente directe donne une mémoire au goût. Une fois que les clients ont vu la réalité, ils repartent avec des idées différentes. Je défends cette approche et j’essaie de la médiatiser pour faire connaître le métier avec moins de stéréotypes. »
Comme la plupart des agriculteurs,PhilippeRoucann’échappe pas aux contrats ou à l’idée de contrat, il en discerne deux types : « Mon contrat avec les consommateurs est de leur fournir une viande de très grande qualité pour un prix donné. Le contrôle s’effectue quand ils viennent et voient, je ne crains pas ce contrôle. Ce type de contrat est une forme volontariste entre deux parties, un mariage d’amour. Il y a aussi tous les autres contrats que je signe, comme les déclarations PAC : là, c’est une obligation, un mariage forcé.
Le premier est un contrat à l’ancienne, on tape dans la main, c’est un contrat d’hommes libres. Plus on passe de contrats forcés, plus cette liberté s’en va : je ne saurais pas m’engager dans un prévisionnel sur 5 ans, et remplir dix fois la même déclaration me pèse... Mon troupeau est l’objet de contrôles de performances, par la maison de l’élevage et ma production serait labellisable, mais je n’ai pas besoin de payer ce service : le label, c’est Philippe Roucan et mon exigence. Je reconnais que c’est une forme individualiste... »

Au cours d’un débat, Phillipe Roucan est interrogé sur la limite que constituerait le temps pour nourrir ce rapport de proximité avec ses consommateurs-clients : « Depuis 25 ans, j’ai la passion de l’élevage. Aujourd’hui, après 20 ans, j’en vis mieux grâce à la vente directe. Si j’avais voulu être riche, j’aurais fait autrement, mais je suis un homme heureux : ce temps passé avec mes vaches, avec les clients, tout ce que ça peut m’apporter ! peut-être pas de l’argent mais du bonheur... »

« 8. Dans nos société le « nourrir » est devenu accessoire. Notre approche de la valeur ajoutée s’inscrit donc dans une approche globale du maintien du tissu rural et le consommateur va devoir faire des choix sur l’agriculture qu’il souhaite au plan européen »

Par Bernard Bonnet. Président des producteurs Plaimont (Gers).

Il y a un peu plus de 25 ans, nous avons décidé de sortir de notre statut de producteurs de matière basique pour aller vers des produits à valeur ajoutée dans le but de maintenir le tissu rural, les petites exploitations familiales et pour permettre aux jeunes de s’installer.
Nous nous sommes donc imposés collectivement une auto-discipline selon laquelle chaque producteur a le devoir d’aller au-devant du consommateur, qu’il soit à Lille, en Belgique, au Canada ou dans un des 29 autres pays dans le monde où nous exportons une bouteille sur deux.
Je crois que les filières n’ont pas pris en compte suffisamment tôt qu’elles devaient avoir un lien direct avec le consommateur, qu’elles devaient arrêter de se retrancher derrière ce statut « nourricier ». Dans nos société le « nourrir » est devenu accessoire. Notre approche de la valeur ajoutée s’inscrit donc dans une approche globale du maintien du tissu rural et le consommateur va devoir faire des choix sur l’agriculture qu’il souhaite au plan européen. Et son choix aura des conséquences sur nos modes de vie et l’évolution de la société entière. D’autant que depuis 25 ans, nous vivons ce paradoxe : les consommateurs veulent, logiquement, des produits de plus en plus qualitatifs alors que le ratio du budget des ménages s’est inversé inexorablement vers de moins en moins de pouvoir d’achat à l’alimentaire. Il faut donc que les structures individuelles et collectives prennent en compte cette évolution.
Bref, on ne pourra pas faire vivre un département essentiellement rural sans en sortir, ni sans sortir de France. Il faut avoir de l’ambition. Ce tissu rural ne se développera que si nous allons sur le marché mondial, en menant des contacts de proximité dans ce grand ensemble économique.
Nous nous sommes donc engagés de façon collective dans la distribution de nos produits, car nous avons vu qu’à chaque fois que nous l’abordions en rang désordonné, nous n’arrivions pas à nous mettre en relation cohérente avec le consommateur.
Par ailleurs, nous ne devons pas être prisonniers des contrats que la distribution tente de nous imposer. Nous avons un vrai virage à prendre. La distribution l’a bien compris, elle développe de plus en plus de marques de distributeurs. Danger donc pour les consommateurs, contrairement à ce qu’on veut faire croire, et danger pour nous qui serons relégués à n’être plus que des fournisseurs de matière première. Il faut donc que nous proposions nos propres cahiers des charges sur lesquels nous garantissons une validité, source de confiance, car bien sûr le marché a besoin de confiance.
Je pense que nous donc devons expliquer notre valeur ajoutée au consommateur. Il faut lui assurer la qualité basique, la traçabilité, dans laquelle nous sommes engagés depuis 7-8 ans, par une propre auto-discipline, un propre auto-contrôle tout en payant des bureaux de contrôles, car la confiance passe aussi par les contrôles. Cela nous demande de passer du temps à écrire, à remplir des classeurs et à expliquer au consommateur. Mais, ce n’est pas du temps perdu, car nous sommes surpris de voir que des choses qui semblaient évidentes ne le sont pas pour bien des gens.

« 9. L’impression d’être sous le regard des citadins, une profession sous surveillance, la seule activité qui soit pratiquée au vu et au su de tous ! »

Propos d’un groupe de réflexion d’agriculteurs dans le Gers. Ils se sont penchés sur le thème durant une année, aidés dans ce vaste travail, par une sociologue, Anne-Marie Granié (1) et un géographe, Jean Pilleboue (2), leurs questions sont très directes, leur intervention a inauguré l’Université d’été. Créé en juin 2001, le « groupe local de réflexion » lance des questions très directes. Formé de 11 agriculteurs maires de leurs villages, tous des hommes et tous membres de la commission « Economie, agriculture, commerce » de la communauté « Bastides et vallons du Gers », auxquels s’ajoutent treize autres acteurs (dont trois femmes) impliqués dans des initiatives concourant au développement productif local

A travers une parole souvent passionnée, transcendant leurs multiples différences (d’âge, de structures d’exploitation, de systèmes de production, de localisation -entre plaines et coteaux, etc.), ces agriculteurs analysent leurs difficultés, ébauchent des solutions possibles, expriment des points de vue et des inquiétudes sur leur position dans la société. Ce sont certains de ces propos que nous voudrions résumer ici.
Ce qui domine tous les débats, c’est le sentiment d’être « coincés » par tous les bouts.
D’abord, le plus important, le plus matériel, celui des revenus. Par nature, irréguliers d’une année à l’autre, fortement inégaux d’une famille d’agriculteurs à l’autre, il est impossible de les apprécier de l’extérieur, mais les intéressés sont unanimes : au fur et à mesure que le temps avance, se renforce l’impression de s’éloigner d’un « âge d’or », réel ou rêvé et magnifié, où, bon an mal an, l’on retirait de son activité de quoi vivre « normalement ».

L’ âge d’or s’est éloigné, celui où l’on retirait de son activité de quoi vivre « normalement ».

Certains soulignent avec plus de force que d’autres les conséquences de l’agrandissement des exploitations - surtout des exploitations de grande culture- destiné à inverser individuellement cette tendance : la concurrence nuit aux indispensable solidarités productives et revendicatives. Quant aux grandes exploitations ainsi constituées, elles s’isolent progressivement dans l’espace et dans la société rurale. Mais, quelle que soit la dimension des exploitations de ceux qui partent à la retraite, il y a de moins en moins de jeunes pour les reprendre et la concentration se ferait de toutes façons : tout est lié, on ne peut pas raisonner seulement en termes de « causes » et de « conséquences ». Il semble pourtant que certaines formes de l’individualisme des agriculteurs aient trouvé leurs limites comme l’exprime en tout cas le besoin de recréer entre eux des liens professionnels et de voisinage.
Alors que les citadins et vacanciers leur disent : « Vous au moins, vous n’êtes pas stressés, vous vivez à la campagne ! », le stress des agriculteurs est bien réel. Il est d’abord lié à l’évolution des rapports avec l’amont et avec l’aval : les prix des produits agricoles stagnent ou diminuent. Moins matérialisé mais tout aussi grave est le fait que les pouvoirs publics et la société ne formulent plus de messages clairs sur ce qu’ils attendent de l’agriculture et des agriculteurs : « Aujourd’hui, dit un agriculteur, dans l’agriculture, c’est plein de petits contrats mais il n’y a plus de contrat global ! ». Résultat : « On ne sait pas où on va mais on y va et on ne voit pas de moyens pour ne pas y aller... ».

« Le courant ne passe plus. Les citadins veulent tout et son contraire ».

En fin de compte, c’est avec les citadins et, plus largement, avec tous les non-agriculteurs que « le courant ne passe plus ». « Ils veulent tout et son contraire ». Par exemple, des produits qui soient à la fois « bons et pas chers », des paysages et un environnement « agréables »... Souvent exprimées sous des formes simplistes, ces exigences difficilement conciliables sont mal perçues par les agriculteurs : « Ils ne connaissent rien à notre métier, le dévalorisent et ils nous prennent pour des pingouins ! ». Ce sentiment est d’autant plus fort que ceux-ci ont l’impression d’être sous le regard des citadins, comme une profession surveillée par la société en quelque sorte : c’est la seule activité qui soit pratiquée au vu et au su de tous !
De tout cela résulte la sensation très largement partagée d’être pour le moins incompris, voire mis en accusation. On ressent effectivement la peur, pour ne pas dire la hantise que s’établisse une grande, profonde et durable rupture entre la société et les agriculteurs. Il existe certes bien d’autres ruptures dans la société française mais celle-ci irait à l’encontre d’un trait fondateur de l’identité nationale qui a toujours mis au premier plan le « caractère paysan » de la France ainsi que les particularités de ce métier qui traite du vivant, qui aménage le territoire et contribue largement à créer l’environnement des citadins. Or, les agriculteurs ne se résignent nullement à cette mise à l’écart. Comme le montrent toutes les formes de rapprochement des producteurs avec les consommateurs de produits (vente directe ou en circuit court) ou de paysages (tourisme rural), ils sont demandeurs de contacts, de vrais débats avec les citadins.
Bref, nous avons le sentiment que, au-delà des aléas de l’économie agricole, des incertitudes nées de l’élargissement de l’Europe et de la perspective de réforme de la politique agricole commune ou des péripéties liées aux alternances politiques, ce grand débat devrait constituer une des « affaires » importantes du début du siècle.

Paroles d’agriculteurs. Une publication. Mission Agrobiosciences)

On peut également lire

« Agriculture entre contrats et contrôles : A la recherche de nouvelles références »-. Lecture des débats par Philippe Lacombe. Directeur scientifique à l’Inra. Dans le cadre de l’Université d’été de l’Innovation Rurale. Marciac 2002.

« La contractualisation, inévitable et imparfaite »- par Patrice Duran. Sociologue. Dans le cadre du débat l’Agriculture entre contrats et contrôles. Marciac 2002

« Echanges et certifications : les arguments de la confiance »- Par Emmanuelle Auriol. Economiste. Dans le cadre du débat l’Agriculture entre contrats et contrôles. Marciac 2002

« La confiance est ce qui reste quand on a tout oublié de la construction juridique qu’est le contrat »- Par Christian-Albert Garbar. Juriste. Dans le cadre du débat l’Agriculture entre contrats et contrôles. Marciac 2002.

« Le Contrat territorial d’Exploitation : impasse ou laboratoire ? »- Par François Léger. Inra. Dans le cadre du débat l’Agriculture entre contrats et contrôles. Marciac 2002.

« Du contrat individuel au contrat collectif : la stratégie de l’Etat et des territoires »-
Par François Projetti. Ministère de l’alimentation, l’agriculture, la pêche et les affaires rurales Dans le cadre du débat l’Agriculture entre contrats et contrôles. Marciac 2002.

Accéder à l’ensemble des actes de la 8ème Université d’Eté de l’Innovation Rurale « L’Agriculture entre Contrats et Contrôles »-. Marciac. Août 2002.

Accéder aux actes de Toutes les éditions des Université d’été de l’innovation rurale de Marciac-

Par Patrick Kirchner, Henri Frémont , Christophe Capdecomme, Mattieu Calame, Marie-Lise Broueilh, Arnaud Abord de Chatillon, Philippe Roucan, Bernard Bonnet et un Groupe de Réflexion d’agriculteurs du Gers...

Accéder à toutes les publications : Agriculture et Société Des conférences-débats, tables rondes, points de vue et analyses afin de mieux cerner les problématiques sociétales liées au devenir de l’agriculture. Edité par le Magazine Web de la Mission Agrobiosciences.

Accéder à tous les Entretiens et Publications : OGM et Progrès en Débat » - Des Points de vue transdisciplinaires... pour contribuer au débat démocratique. Edités par le Magazine Web de la Mission Agrobiosciences

Accéder à toutes les publications : Sur le bien-être animal et les relations entre l’homme et l’animal- Pour mieux comprendre le sens du terme bien-être animal et décrypter les nouveaux enjeux des relations entre l’homme et l’animal. Au cours de forums, de tables rondes, d’entretiens et de restitutions de colloques, la Mission Agrobiosciences cherche, au-delà du décryptage du terme bien-être animal, sujet à controverse, à déceler les enjeux et les nouvelles relations qui lient l’homme et l’animal et à en mesurer les conséquences pour le devenir de l’élevage, de l’alimentation et de la recherche médicale. Un débat complexe mêlant des notions de souffrance et de plaisir, d’éthique, de statut de l’animal, de modèles alimentaires...

Accéder à toutes les Publications : Alimentation et Société- Des conférences-débats, tables rondes, points de vue et analyses afin de mieux cerner les problématiques sociétales liées au devenir de l’alimentation. Edités par le Magazine Web de la Mission Agrobiosciences.

Accéder à toutes les publications « Alimentation en Débats du Plateau du J’GO-.Un Télescopage de points de vue de scientifiques, producteurs et cuisiniers sur l’actualité de l’Alimentation et de la Société organisé par la Mission Agrobiosciences. En collaboration avec le bistrot du J’Go à Toulouse. Rencontres enregistrées et diffusées le troisième mardi de chaque mois de 17h30 à 18h30 et le troisième mercredi de chaque mois de 13h à 14h sur Radio Mon Païs (90.1).

Accéder à toutes les Publications : L’agriculture et les bioénergies.
Depuis 2005, la Mission Agrobiosciences a participé à plusieurs manifestations (et a organisé des débats) sur le thème des bioénergies et de ses enjeux pour le futur de l’agriculture. Le magazine Web « Agrobiosciences » permet d’accéder à leurs contenus et de disposer d’éléments d’éclairage sur les possibilités, les limites, les solutions alternatives. L’ensemble réunit les analyses d’acteurs des filières industrielles et agricoles ainsi que des chercheurs tant dans le domaine de l’économie que de la chimie. (Septembre 2006)

Accéder à toutes publications Histoires de... »- Des conférences-débats, articles et chroniques. Ces publications « Histoire de... » de la Mission Agrobiosciences concernent la science, l’agriculture, l’alimentation et leurs rapports avec la société. Des regards sur l’histoire, pour mieux saisir les objets dont on parle et l’origine technique et humaine des « produits » contemporains. Editées par le Magazine Web de la Mission Agrobiosciences.

Accéder à toutes les publications. Sur l’eau et ses enjeux Pour mieux comprendre les enjeux locaux et mondiaux et les turbulences qui agitent les acteurs de l’eau
Au cours de forums, de tables rondes et de conférences, de revues de presse et de sélections d’ouvrages, la Mission Agrobiosciences cherche à décrypter les enjeux mondiaux et locaux qui agitent le monde de l’eau : de la simple goutte perlant au robinet aux projets de grands barrages, d’irrigations en terres sèches... les turbulences scientifiques, techniques, médiatiques et politiques du précieux liquide.

Accéder à toutes les Publications : Sciences-Société-Décision Publique- Une « expérience pilote » d’échanges transdisciplinaires pour éclairer les enjeux, mieux raisonner, par l’échange, les situations de blocages en « Science et Société », instruire les débats en cours, clarifier des enjeux scientifiques et sociétaux des avancées de la recherche, participer à l’éclairage de la décision publique et proposer des réflexions et des objets de recherche à la science. Edités par le Magazine Web de la Mission Agrobiosciences.

Accéder à toutes les Publications : Science et Lycéens- Des conférences de scientifiques de haut niveau et des débats avec les lycéens exprimées dans le cadre « L’Université des Lycéens » une expérience pilote pour lutter contre la désaffection des jeunes pour les carrières scientifiques. Ces publications constituent un outil pédagogique « vivant » qui favorise une lecture agréable et une approche « culturelle » de la complexité de la science. Edités par le Magazine Web de la Mission Agrobiosciences

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