15/04/2024
Revue de presse du lundi 15 avril 2024
Nature du document: Revue de presse
Mots-clés: Eau , Nature , Pesticides , Santé

Riz amer en Camargue

L’Avanza est montré du doigt. Cet herbicide « normalement interdit en France » a obtenu une dérogation du ministre de l’Agriculture pour être utilisé dans les rizières de Camargue jusqu’au 11 juillet, s’alarme Hugo Clément fin mars dans sa chronique sur France Inter. Le journaliste s’inquiète qu’un produit présenté comme « très toxique pour les organismes aquatiques  » puisse déborder des rizières à cause des trous des ragondins ou des écrevisses américaines pour contaminer l’eau. Le directeur de la réserve nationale de Camargue juge « choquant  » que cette nouvelle molécule soit utilisée. Il dit ne pas avoir les moyens techniques de la détecter dans l’étang de Vaccarès. L’Avanza est aussi suspecté d’être un perturbateur endocrinien, souligne Hugo Clément. Maire de la commune des Saintes Maries de la Mer, Christelle Aillet dit redouter une contamination de l’eau potable puisée dans le Petit Rhône.

Agnès Pannier-Runacher tempère ces inquiétudes en assurant que les doses sont « très limitées ». La ministre déléguée à l’Agriculture fait valoir que l’Avanza est autorisé dans d’autres pays européens. L’Avanza est « vraiment nécessaire pour les riziculteurs de la Camargue qui n’ont à leur disposition que six substances actives  », répond le gouvernement aux écologistes de la région qui demandent le retrait de cette dérogation. L’élue (LR) des Saintes Maries de la Mer se réserve toutefois la possibilité de contester la décision devant le tribunal administratif. Elle a saisi ses collègues de la communauté d’agglomération Arles-Crau-Camargue-Montagnette, signale l’AFP repris par 20 Minutes. «  Il y a des riziculteurs qui mettent des canards dans les rizières pour manger les mauvaises herbes, c’est écolo et humain, plus que ces produits », dit Christelle Aillet à Libération. L’élue déclare vouloir aussi saisir l’Agence Régionale de Santé (ARS) et le parc naturel régional de Camargue pour « mettre un coup de pied dans la fourmilière ».

Le poison du sel

Les maires des autres communes ont finalement « apporté leur soutien aux riziculteurs, et Christelle Aillet ne répond plus aux sollicitations  », rapporte la correspondante du Monde dans le Gard. Les producteurs ont même cuisiné un risotto géant devant la mairie lors du conseil municipal « pour montrer à madame la maire que notre riz est le meilleur  », déclare Bertrand Mazel, président du syndicat des riziculteurs. Les 150 producteurs se défendent en assurant que le riz de Camargue (72.000 tonnes sur 12.000 hectares (ha)) serait le plus « vertueux » du monde, avec déjà 25% cultivés en bio. «  Aujourd’hui, il n’est pas possible de faire du bio partout, en Camargue, pour une question de salinité. La seule manière de faire du riz biologique est de pouvoir cultiver par rotation, ce qui implique aussi de semer du blé ou d’autres céréales », explique le directeur du parc naturel régional, Christophe Fontfreyde.

Le riz est même présenté par la télévision régionale comme une technique historique de protection des sols contre le « poison » du sel, cultivé dès le XIXème siècle dans tout le delta du Rhône grâce à des canaux de drainage des marécages. La culture à grande échelle pour l’alimentation humaine et l’autonomie alimentaire de la France métropolitaine n’aurait débuté qu’avec l’arrivée de travailleurs des lointaines colonies indochinoises en 1941, rappelle France 3 PACA qui souligne une diminution des surfaces cultivées : 13.000 ha en 2023, contre 21.000 ha en 2010. « Nous manquons de solutions phytosanitaires  », déplorait alors Bertrand Mazel devant la caméra en expliquant avoir perdu près de la moitié de sa récolte à cause « des mauvaises herbes ».

Face à la concurrence du riz asiatique, la filière mise sur une Indication Géographique de Provenance (IGP). La coopérative Arterris, qui se présente comme «  le premier producteur de riz en Camargue » en collectant les récoltes d’une cinquantaine de producteurs, propose des contrats intégrés avec prix garantis sur deux ans, applaudit Objectif Gard. La commercialisation du riz IGP (15.000 à 20.000 tonnes/an) dans les grandes surfaces est confiée au groupe Avril, apprend-t-on au détour de ce quasi publireportage.
Le riz de Camargue demeure un marché de niche, 60 Millions de consommateurs. Il est exempt de résidus de pesticides, assure Reporterre, qui reprend les données publiées par l’association de consommateurs. Comme le riz bio, avec ou sans canards.

"Rebuts de presse" par Stéphane Thépot, journaliste

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