19/02/2024
Revue de presse, lundi 19 février 2024
Nature du document: Revue de presse
Mots-clés: Consommation , Eau , Pesticides , Santé

L’eau ne coule plus de source, en supermarchés comme aux robinets

La semaine passée, des bouteilles d’eau de source ont été retirées des rayons d’Intermarché, suite à une contamination de la nappe souterraine par des métabolites de Chlorothalonil, un fongicide désormais interdit. Conséquence, l’usine d’embouteillage des lots incriminés a arrêté sa production le 14 février. Et maintenant ? Le point dans cette revue de presse, proposée par le journaliste Stéphane Thépot.

Des bouteilles d’eau de source ont été retirées des rayons d’Intermarché cette semaine. En raison d’une contamination aux pesticides, selon La Nouvelle République révélant que les bouteilles, vendues sous la marque « Fiée des Lois » et « Premier prix », proviennent de l’usine du groupe Agromousquetaires à Prahecq (Deux-Sèvres) qui a stoppé sa production le 14 février. Le directeur adjoint de l’Agence Régionale de la Santé (ARS) Nouvelle Aquitaine dans le département précise au quotidien régional qu’un métabolite du Chlorothalonil a été détecté en septembre 2023 dans la nappe souterraine qui alimente l’usine depuis 1992. « Cette molécule d’un fongicide pourtant interdit d’utilisation depuis 2020 a été retrouvée massivement lors de campagnes exploratoires de l’Anses (1) », explique La Nouvelle République. « Mais l’eau reste potable, il n’y a pas de problèmes de santé  », assure une autre responsable locale de l’ARS.

L’article du quotidien régional s’inquiète surtout pour les risques de chômage partiel des 150 salariés de l’usine, «  l’un des plus gros employeurs du secteur  ». A 15 km de Niort, l’usine d’embouteillage de Prahecq (2 000 habitants) figure parmi les cinq plus importantes de France. Son activité principale est le conditionnement du vin, en bouteille ou en « bag in box » (BIB) qui représente 90% de son chiffre d’affaire. L’usine produisait 100 millions de litres d’eau par an en 2023, selon son directeur. Elle ne produirait en réalité que 45 millions de bouteilles d’eau, selon La République du Centre. Elles n’ont été retirées de la vente que par « principe de précaution et en responsabilité  », selon cet autre titre voisin de la presse régionale relayant un communiqué d’Intermarché. «  Le retrait est une mesure de précaution », confirme la directrice déléguée de l’ARS dans les Deux-Sèvres à Ouest France. Elvire Aronica explique que le Chlorothalonil « est imprégné dans les sols et dans les sources superficielles (…) Auparavant, la présence de ces produits dans l’eau n’était pas mesurée ».

La détection de ce métabolite d’un fongicide de la famille des organochlorés dans la nappe de Prahecq pose problème à la fois aux vendeurs d’eau en bouteille et aux syndicats d’adduction d’eau potable. « Ce n’est pas la première fois que l’on parle de Chlorothalonil puisqu’il a déjà été retrouvé dans l’eau du robinet distribuée dans le Grand Poitiers, mais aussi à La Rochelle, ce qui avait poussé la municipalité à fermer sa quinzaine de points de captage d’eau », souligne la radio locale Alouette FM. Dans un deuxième article, la Nouvelle République révèle que « 50 à 75% des ressources d’eau potable des Deux-Sèvres dépasseraient la limite de qualité  » (0,1 gramme par litre) fixée par les autorités sanitaires. Mais aucune analyse n’aurait montré un dépassement du seuil de potabilité (0,3 grammes par litre). Selon le quotidien régional, les dix syndicats des eaux concernés devraient déposer des demandes de dérogations d’ici le mois d’avril. « Les arrêtés préfectoraux de dérogation seront pris début août 2024  », annonce d’ores et déjà le directeur adjoint de la délégation des Deux-Sèvres de l’ARS au quotidien régional. Députée des Deux-Sèvres et présidente de Génération Ecologie, Delphine Batho en profite pour dénoncer la « mise en pause » du plan Ecophyto annoncée par le Premier ministre, signale la télévision régionale.

Le retrait des bouteilles d’eau de source d’Intermarché intervient après la mise en cause de Nestlé et Cristalline, souligne LSA. Le magazine spécialisé dans la grande distribution évoque « une série noire ». Une enquête commune de Radio France et du Monde s’était penché fin janvier sur les techniques de filtration et de « purification » utilisées dans les usines d’embouteillages des producteurs d’eau de sources et eaux minérales. « Les ressources aquifères exploitées par Nestlé sont régulièrement contaminées microbiologiquement, notamment par des bactéries de type Escherichia Coli. Des traces de polluants chimiques, comme des métabolites de pesticides, ont également été découvertes dans l’eau de Perrier  », résume Marie Duplin de la cellule Investigation de Radio France.

Que Choisir s’inquiète d’un possible « chantage à l’emploi  » : «  le groupe Nestlé demande un assouplissement de la réglementation, faute de quoi l’exploitation de certains de ses sites en France (dans les Vosges et dans le Gard) pourrait être abandonnée, rapporte le magazine de défense des consommateurs ». « Une tempête dans un verre d’eau », estime de son coté Le Point qui s’employait dès avril 2023 à rassurer ses lecteurs à propos du Chlorothalonil et ses métabolites. «  La substance fait partie de la catégorie 2B, "peut-être cancérigène", vaste fourre-tout de près de 300 substances, présentes dans les détergents de pressing, les fumées de soudure, les légumes conservés dans le vinaigre et les feuilles d’aloe vera », énumèrent Géraldine Woessner et Erwan Seznec.
Pour en revenir à Prahecq et à Intermarché, « le problème, il est pour l’exploitant qui exploite une eau de source. Si elle est traitée elle ne peut plus être appelée eau de source », expose Elvire Aronica de l’ARS à Ouest France. « Au-delà de ces problèmes de qualité, la question de la quantité pourra se poser dans un département peu riche en réserves souterraines en proie à une « guerre de l’eau » autour des usages de la ressource », conclut La Nouvelle République.

Lire aussi la campagne nationale de mesure des polluants émergents dans l’eau potable par l’ANSES

"Rebuts de presse" par Stéphane Thépot

(1) Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.


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