Escrocs, tel abattoir irlandais ou tel trader de viande néerlandais ? Sans nul doute. D’autant que, ironie de l’histoire, le qualificatif a une origine quelque peu bouchère. En latin, scroccare (escroquer), c’est en effet tout simplement le fait de décrocher, d’enlever du croc ou du crochet. En clair, il s’agit de manger aux dépens d’autrui, de vivre à ses crochets en quelque sorte… Après le verbe, le substantif : au 17è siècle, ces pique-assiettes et autres écornifleurs ne tardent pas en effet à se voir qualifiés d’ « escroqueurs » ou d’ « escroqs », sous l’influence de l’italien scrocco.
Quant à l’arnaque, le mot est tout aussi approprié pour qualifier cette vaste duperie où l’on vous fait prendre du cheval pour du bœuf. Car à l’origine, c’est d’ « harnacher » dont il était question, ce qui nous plonge effectivement dans l’univers équin. Une mise au harnais qui, au sens figuré, a dérivé vers le sens de l’accoutrement, donc de la tromperie.
Mais ce qui aurait vraiment de l’allure, pour sûr, ce serait de traiter ces piètres aigrefins, ces vils fraudeurs, ces larrons du canasson de... malandrins. Après tout, cela nous vient tout droit de la malandria qui, devinez quoi, est « une maladie des chevaux se traduisant par des pustules au cou » (dictionnaire historique de la langue française, Alain Rey). Et là, question traçabilité, cela faciliterait grandement l’identification des crapules de la filière.
Valérie Péan
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