L’Europe doit défendre sa politique en faveur des pays en développement
Questionné tout d’abord sur la plaidoirie du président de la République, Jacques Chirac, en faveur d’un impôt mondial afin de lutter contre la pauvreté dans le monde, Hervé Gaymard rappelle que « L’Europe et le Japon consacrent le plus fort pourcentage de leur richesse pour l’aide au développement ». Le Ministre de l’Agriculture ajoute que l’Europe est un débouché pour 60% de l’agriculture des pays en développement notamment grâce aux préférences commerciales spécifiques pour les pays les plus pauvres.
Interrogé par Jean-Pierre Elkabbach à propos de son récent voyage à l’Ile Maurice où il a défendu l’industrie sucrière, Hervé Gaymard rappelle que, depuis longtemps, l’Europe achète le sucre à ces pays à un prix plus élevé que le cours mondial, ce qui, selon lui, permet à leur activité sucrière de perdurer. Une pratique qui est menacée par un récent accord entre le Brésil et la Thaïlande, accord auquel le Ministre de l’agriculture s’oppose.
L’Europe, garante des performances agricoles françaises, doit se doter de systèmes d’amortissements des crises
Réaffirmant son attachement à l’Europe, le Ministre de l’Agriculture rappelle des faits « Les deux tiers de mon budget agricole sont européens. Sans l’Europe, la France ne serait pas la 2ème puissance mondiale agro-alimentaire ». Prenant l’exemple de la pêche, il signale que les ¾ des prises des pêcheurs français sont effectuées hors des eaux françaises : « Sans l’Europe, les ¾ de notre flotte disparaîtrait ».
Signalant qu’il n’est pas un « grognon structurel », même s’il admet qu’il y a parfois, pour le secteur agricole, « des cailloux dans les godasses des tracasseries européennes », Hervé Gaymard rappelle qu’il y a des crises agricoles depuis que le monde rural existe, c’est à dire depuis l’antiquité. « Mais on ne peut pas vivre comme l’oiseau sur sa branche. Ce qu’il manque, ce sont des systèmes de gestion d’amortissement de ces crises ». Il affirme que ce sera l’objet de son « grand combat pour les 600 000 agriculteurs mais aussi pour les 60 millions de consommateurs français ».
Devenir de l’agriculture française à l’horizon 2020 : un large débat national pour nourrir la future loi de modernisation agricole
Alors qu’il lance un vaste débat national sur l’agriculture (1) afin de faire remonter des propositions en vue de la prochaine loi de modernisation agricole pour 2006, Hervé Gaymard rappelle que l’exercice doit « tracer le paysage de l’agriculture jusqu’en 2020 ». Une loi qui devra effectivement prendre en compte les grandes évolutions et enjeux concernant le triptyque « agriculture-territoire et société ». Et ce dans un pays, « la France mais aussi l’Europe », qui « n’existerait pas sans son terroir ».
L’entretien s’est achevé sur les conditions de travail des agriculteurs. Sur ce sujet, Hervé Gaymard donne l’exemple des éleveurs qui, femmes et hommes, travaillent généralement le double (du temps de travail moyen en France) et signale que les conditions de vie des agriculteurs constitueront un axe majeur de la loi de modernisation à venir. S’il évoque « Les services de remplacement ou encore les formes sociétaires pour des exploitations regroupées... » c’est pour réaffirmer qu’il attend, avant tout, les propositions qui seront issues du débat national sur l’agriculture qu’il vient d’engager.
(1) L’organisation de ce débat national est en cours. Le 20 Septembre 2004, une Commission d’orientation du débat national « Agriculture, territoires et société » a été installée par le Ministre de l’Agriculture. Elle comprend des personnalités venues d’horizons très divers.