La biodiversité c’est maintenant (note de lecture)
Copyright : éd. de l’Aube
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Des secrets des nautiles à la précocité des chenilles, c’est à une aventure scientifique que nous invite Bernard Chevassus-au-Louis, nommé préfigurateur de l’Agence Nationale pour la Biodiversité par la Ministre de l’Environnement. Ce livre explique sans emphase ni jargon ce qu’est la biodiversité, quelles sont les transformations du monde qui la menacent et pourquoi elle nous est importante. De ces descriptions découlent naturellement des principes d’action qui peuvent être retenus pour tenter d’enrayer le dommage à la diversité des organismes vivants. Accessible et rempli d’anecdotes symboliques, ce livre prend acte des travaux réalisés depuis une cinquantaine d’années pour balayer quelques croyances et illusions que nous pourrions nourrir.
Sans sacraliser la biodiversité, mais en montrant ce qu’elle apporte, en détaillant ses ressources et ses faiblesses, cet ouvrage est un plaidoyer pour un engagement politique en faveur de la diversité du vivant.
L’auteur de l’ouvrage explique que la biodiversité, ce néologisme datant de 1988 que l’on doit à l’entomologiste Edward O. Wilson, est un concept bien plus large que la simple diversité génétique. La biodiversité concerne en effet un éventail extrêmement large de diversités sans cesse en recomposition. Elle va de la diversité phénotypique, c’est-à-dire des caractères exprimés par les individus, aux macro-écosystèmes nommés biomes. Ainsi ce livre fourmillant d’exemples, est une invitation à observer les changements et les évolutions des organismes vivants.
Au fil du livre, le lecteur apprend ainsi que nous connaissons seulement 1,9 millions d’espèces sur peut-être 10 millions et que nous en découvrons à peu près 10 000 nouvelles par an. Le travail d’exploration de la biodiversité ne manquera donc pas pour de nombreuses années. Mais celle-ci court un grand risque de se voir réduire : l’ancien Directeur du Muséum national d’Histoire naturelle, nous prévient qu’au rythme actuel de l’érosion de la biodiversité, nous risquons de n’avoir pas le temps d’observer et de décrire ce patrimoine. Les espèces sont et seront nombreuses à disparaître « silencieusement ». C’est pourquoi ce livre recommande l’application du principe de précaution à la politique de la biodiversité : il s’agit de prendre les mesures provisoires et proportionnées afin d’éviter des pertes irréversibles.
Bien que la biodiversité n’aie jamais été immuable, le livre revient sur les réductions actuelles de la biodiversité et constate une quantité anormalement élevée de disparitions. Aussi l’ouvrage détaille-t-il les raisons de cette extinction. Certes, la surexploitation du vivant fait un bon coupable, mais la détérioration des habitats agit sans doute plus profondément. Face aux défis que ne manqueront pas de provoquer les changements climatiques, l’auteur plaide pour une politique de protection. L’anticipation des évolutions climatiques ne pourra suffire et, pour protéger la biodiversité face à celles-ci, les atteintes faites par ailleurs aux écosystèmes doivent être réduites.
L’esthétique et le culturel sont des apports non négligeables de la biodiversité, mais pour bien la défendre, l’auteur prend le parti de lui reconnaître sa pleine utilité. Ainsi nous révèle-t-il les fonctions méconnues de la diversité du vivant et des milieux. Par exemple, Bernard Chevassus-au-Louis nous apprend qu’elle joue un rôle de sentinelle face à des déséquilibres inquiétants. Cette connaissance peut nous pousser à veiller sur la biodiversité, car ainsi nous pourrions également prévenir des risques portés aux sociétés humaines.
Cette veille nous permettra de préférer un suivi pas-à-pas à une planification d’adaptation jugée trop rigide. Le livre nous rappelle que Maxime Lamotte, biologiste et pionnier de l’écologie, exprimait ainsi cette attitude : « Conserver la nature, c’est lui conserver les possibilités évolutives ». De plus, « La biodiversité appelle la biodiversité » rappelle souvent l’auteur : c’est pourquoi elle est une juge efficace des évolutions des environnements. Aussi, le livre nous encourage-t-il à apprendre à regarder l’invisible au travers de ses habitats, à donner à la biodiversité les possibilités de se développer et à savoir lâcher prise au bon moment. Vaste programme …
Note de lecture de Nicolas Geoffroy, stagiaire à la Mission Agrobiosciences, février 2013.
La biodiversité c’est maintenant, Bernard Chevassus-au-Louis, Editions de l’Aube, 2013. 192 pages. 17,10€
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