16/02/2004
Maryline Trassard.

Tant qu’il y aura des coquelicots. Voyage en agriculture.

C’est à un « Voyage en agriculture » que nous invite Maryline Trassard, une succession de reportages chez une quarantaine d’agriculteurs dans toute la France. Un voyage pour scruter les ombres de l’évolution récente du métier et pour pointer des futurs redoutés, pour rencontrer ceux qui explorent les voies d’une agriculture respectueuse de l’environnement et plus particulièrement ceux qui ont fait l’option de l’agriculture biologique.

Elevages de moutons des plateaux de l’est ou brebis des causses de Roquefort, chèvres en Bourgogne ou vaches Gasconne dans la montagne niçoise, Charolais à l’herbe dans le Bourbonnais, riz de Camargue, cultures maraîchères à Cagnes-sur-Mer, céréales dans l’Yonne et dans la Meuse, vigne des Pyrénées Atlantiques, et d’autres encore... le tout agrémenté de lapins, de vers à soie et d’huile d’olive. Retenons qu’il s’agit souvent de choix faits par les agriculteurs en référence à des « intérêts bien compris » : intérêts pour les milieux naturels, pour les conditions de travail, pour les équilibres économiques des exploitations. L’auteur passe de l’un à l’autre de ces cas en évoquant les routes de campagne comme les aires d’autoroute, les restaurants et les cafés de villages, les cuisines de campagne chaleureuses, les grand-mères attentives à la visiteuse de passage... On la ressent soucieuse de détails et curieuse de comprendre comment ses interlocuteurs ont fait leurs choix. Le parcours se termine en Bretagne où, après avoir fait l’éloge de l’alliance exemplaire entre les agriculteurs et les ostréiculteurs de la Ria d’Etel, l’auteur exprime sa surprise en recueillant le témoignage d’éleveurs de volaille en contrat avec des firmes intégratrices, un « cas » qui agit tel un repoussoir par rapport à la « France du bio ».

Retour au lycée agricole de la jeunesse, en Normandie, et entretien avec l’ancien « prof » d’économie-gestion, retrouvé vingt-cinq ans après : il fournit à son ancienne élève une analyse d’ensemble de ses reportages. Sur l’agriculture biologique, l’expression d’un mouvement d’ensemble vers un plus grand respect de l’environnement, certes, mais pas de rupture par rapport à une logique « duale » : d’un côté une production agricole de masse pour approvisionner de grandes filières, de l’autre une production « sous signes de qualité » en réponse à des besoins quantitativement limités. Sur les consommateurs : un doute quant à leur capacité à faire des choix qui favoriseraient une agriculture de produits de qualité, en dehors d’une minorité d’entre eux. Sur les difficultés des élevages « intégrés » : beaucoup plus le signe d’une évolution de la répartition du travail à l’échelle mondiale que les conséquences d’une agriculture intensive. Et finalement un certain désabusement quant à la capacité d’innovation des acteurs de l’agriculture... les enseignants, les lycéens comme les agriculteurs !

La tonalité des récits apparaît morose, en écho avec le malaise du monde agricole en recherche de repères et malgré la sympathie évidente que l’auteur manifeste pour ses interlocuteurs. Pourtant, tout au long de ce parcours, on perçoit des lumières, celles provenant d’agriculteurs qui disent par exemple combien les pratiques de l’agriculture biologique les amènent à plus d’attention aux sols, aux plantes, aux animaux et à leur cycle de développement, et ainsi à retrouver ce qu’ils ressentent comme étant pleinement leur métier. On se prend à penser que le titre de ce livre aurait pu être : « La nostalgie des coquelicots ». Des coquelicots que Raymond Lacombe dénonçait un jour, au cours d’un survol en hélicoptère du sud-est de l’agglomération toulousaine, comme le symbole des méfaits de la Politique Agricole Commune, réagissant à son interlocuteur qui lui désignait ce qu’il avait appelé un champ de coquelicots : « Non ! Ce n’est pas un champ de coquelicots ! C’est une jachère ! ». C’était au milieu des années quatre-vingt-dix !

Par Jean-Claude Flamant, Directeur de la Mission d’Animation des Agrobiosciences.

L’Aube, 2004, 17€80.

Voir aussi les Actes de la Quatrième Université de l’Innovation Rurale : « Agriculteurs et Forestiers : nouveaux défis pour la gestion des territoires ruraux »-, avec notamment l’intervention de Salvadore Ferré, Président de l’Association de l’Agriculture Biologique Aquitaine Midi-Pyrénées.

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