Les deux écoles ont bien sûr du sens, mais il faut admettre qu’il est certainement plus facile de spéculer sur les principes fondamentaux de l’Internet (liberté, égalité, gratuité, neutralité…) lorsque l’on habite dans les grandes villes et que la fibre est une évidence. Car pour ceux qui habitent « l’hyper rural », il s’agit encore trop souvent de gros sous pour que le téléphone passe, ou qu’un débit digne de ce nom leur permette de ranger le modem au placard.
Reste que la question des infrastructures avance bien. Le Programme national très haut-débit (PNTHD) se déploie petit à petit vers l’horizon d’une connexion de 100 Mo/s pour tout le monde en 2022. Les territoires ruraux peuvent désormais commencer à rêver à ce désenclavement dont on leur parle depuis 15 ans déjà, à l’époque d’une certaine bulle.
« Le numérique n’est plus un secteur mais un phénomène général de changement de la société » [1] auquel les campagnes françaises ont la ferme intention de prendre part et même au-delà. Car en la matière, la France présente de très sérieux atouts : réseaux denses de transports, diversité des terroirs et des environnements naturels, faible densité de la population, la liste est longue pour penser qu’à court-terme, grâce à l’économie numérique, les territoires ruraux vont se redéfinir au sein de l’espace national. Un espace de travail, de conquête, de consommation, de qualité de vie capable de répondre aux nouvelles attentes sociétales, capable aussi d’offrir une alternative aux maux urbains ; il y avait longtemps que le monde rural n’avait pas entendu ça. Alors, fantasme ou réalité, la France va-t-elle devenir un smart pays où la fracture urbain-rural avec laquelle nous sommes nés, va s’estomper peu à peu ?
Si la nouvelle loi pour une République numérique n’a pas vocation à focaliser sur un territoire ou des métiers spécifiques, du côté rural la demande est claire : on s’installe à la campagne dès lors qu’on est correctement connecté, que l’on peut travailler, s’instruire, se divertir, consommer comme tout le monde. En 2010, l’Association des Maires Ruraux de France (AMRF) révélait que l’accès aux technologies numériques était désormais la première priorité des communes rurales et de leurs habitants, avant même les routes et les écoles, chacun ayant compris qu’il n’y aurait pas de (re)vitalisation des territoires ruraux sans passer par la case numérique. Alors, devant l’ampleur de la promesse sociale et des enjeux économiques, faudrait-il une politique nationale de développement numérique dédiée aux territoires ruraux et quel pourrait être son contenu ?
Nous vous invitons à prendre part au débat en nous faisant parvenir vos contributions, et vous proposons quatre interventions filmées pour amorcer la réflexion. Vos contributions seront publiées sur le magazine Web de la Mission Agrobiosciences et feront l’objet d’une note d’éclairage diffusée début 2016, au moment de l’ouverture des débats parlementaires.
Pour nourrir la réflexion
- Un phénomène général de transformation de la société Benoît Thieulin, président du Conseil national du numérique
- Les territoires ruraux en mode projets Sébastien Côte, président de RURALITIC
- Agronuméricus, le livre d’Hervé Pillaud, exploitant agricole, producteur laitier, secrétaire général de la chambre d’ agriculture et vice-président de la FDSEA de Vendée
- Pour une politique spécifique aux territoires ruraux, Jean-Pierre Jambes, universitaire à Pau.
Vos contributions, en pratique :
Merci de nous faire parvenir le fruit de vos réflexions, en une page, avant le 31 mars 2016, à christophe@agrobiosciences.com
Repères
- 18 juin 2015. Le Conseil national du Numérique remet son rapport « Ambition numérique » au Premier ministre. 296 pages et 70 propositions pour nourrir l’élaboration du projet de loi.
- 26 septembre 2015. Axel Lemaire, Secrétaire d’Etat chargée du numérique, dévoile son avant-projet de loi. Elle lance un exercice de démocratie participative inédit où tous les citoyens sont invités à contribuer à l’élaboration du texte sur : www.republique-numerique.fr (30.000 votes, 3.500 contributions et 3.000 participants).
- 18 octobre 2015. Fin de la consultation publique.
- 26 octobre 2015. Publication de la synthèse des consultations.
- Novembre 2015. Présentation du texte final au Conseil des ministres
- Janvier 2016. Début des débats parlementaires à l’Assemblée nationale